Zimmer : “Je trouve que ‘techno’ est un mot un peu fourre tout”

Écrit par Jean Gueguen
Photo de couverture : ©Press
Le 16.09.2019, à 14h43
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Écrit par Jean Gueguen
Photo de couverture : ©Press
Protégé du label montant Roche Musique, le producteur et artiste live Zimmer sortira un premier album le 27 septembre, après une release party au Rex jeudi 19 septembre en compagnie d’Arnaud Rebotini et de You Man. Alors que le jeune artiste prépare un nouveau live en résidence, Trax Magazine a échangé avec lui au sujet de cette sortie, sobrement intitulée Zimmer.

Après quelques EP sortis en digital, tu sors un premier album,  chez Roche Musique, à quel moment as-tu passé le pas ? En quoi la démarche était-elle différente ? 

J’ai mis du temps à me sentir prêt à ça. J’ai commencé uniquement DJ, mais très vite mes premières productions ont été signées, donc il a fallu apprendre à devenir musicien.

J’ai pris cette décision en terminant l’EP Ceremony, vers octobre novembre 2016 et à vraiment travaillé dessus début 2017. J’ai fait la démo de la première track, qui est devenue « Wildflowers », à Los Angeles chez un pote le 5 janvier. Le dernier titre qui sort vendredi 20 septembre, « Make It Happen », également en featuring avec Panama étrangement, a été terminé à Noël dernier. La production en elle-même a donc pris deux ans.

Ce qui m’a vraiment poussé, c’est l’envie d’un format long pour explorer davantage. J’aime à la fois la musique intense, qui tend vers la techno, et la musique très calme. J’avais envie d’explorer ces deux facettes de ma musique avec plus de radicalité. Je voulais aussi présenter un projet artistique complet avec un live, une direction artistique propre. L’album est le format idéal pour un projet artistique complet.

C’est ce que je cherche dans la musique, ce moment où les gens sont réunis et où il règne une espèce de communion entre tout le monde. Selon moi, c’est pour ça que beaucoup d’entre nous sortent écouter cette musique qui rassemble

Zimmer

Parlons de cette direction artistique. Quelques morceaux de l’album sont sortis en avant-première au cours de l’année, ils arborent des visuels où l’on voit une foule de personnages identiques orientés vers une même direction, quel était le message ?

On a fait la DA avec le studio parisien H5, auteur de plein de pochettes de disques et qui a travaillé avec Étienne de CrécyArnaud RebotiniAlex Gopher… Je voulais mettre en avant un concept important pour moi, celui de partage. C’est ce que je cherche dans la musique, ce moment où les gens sont réunis et où il règne une espèce de communion entre tout le monde. Selon moi, c’est pour ça que beaucoup d’entre nous sortent écouter cette musique qui rassemble. On a créé l’image d’une foule, qui est en fait pleine de petits moi, modélisés en 3D. On utilise ce personnage aussi dans les clips, celui de “Mayans” qui vient de sortir, par exemple. On trouvait la métaphore drôle aussi parce que sur mes précédentes pochettes, j’étais toujours tout seul. Et dans ma musique, il y a une vraie dualité : je fais de la musique à la fois très festive, qui rassemble, mais qui peut aussi être très introspective, solitaire. C’est aussi un parallèle dans ma vie de DJ : je suis très seul la semaine en studio, pour travailler, alors que le week-end, il y a toute cette énergie des clubs et des festivals. On trouvait aussi intéressant de bosser tout en 3D, ça permet de faire des choses qu’on ne peut pas faire dans la réalité, de créer une espèce de monde entre le réel et le virtuel. Et c’est aussi ce que je fais dans la musique, en composant sur ordinateur.

Tu composes principalement sur ordinateur ? Ton set up en live est-il différent ?

 Je travaille beaucoup avec mon ordinateur et un clavier MIDI. Ça me permet aussi d’être mobile, de composer partout où je vais. J’ai commencé à me prendre de passion pour les synthés assez récemment, quand j’ai voulu retranscrire en live les morceaux. Maintenant, mon set up live commence à influencer ce que j’utilise dans le studio, puisque je m’équipe justement pour rejouer avec des vraies machines ce que j’ai fait en studio sur ordinateur.

Tu as commencé une tournée de promotion cet été par des DJ sets. Tu jouais des morceaux du nouvel album ?

 Ça fait à peu près un an et demi que joue ces morceaux, pour moi ils sont quasiment vieux. Même dans la vidéo que j’ai faite pour Cercle, il y a déjà des embryons de ce qui va sortir. “Thunder” marche très bien par exemple.

Quand je fais un nouveau morceau, même si ça ne sonne pas encore très bien, je le teste le week-end qui suit, en tout cas les morceaux jouables en club. Quand on fait de la musique pour faire danser, il faut tester ce qui marche ou non, ça te permet de mieux comprendre comment ça marche, ce qui marche le mieux. 

Est-ce que ces tests ont pu te faire modifier des morceaux ?

 Ça m’a fait en jouer certains plus que d’autres. Tous les morceaux m’ont plu, mais ils sont plus ou moins efficaces sur un dancefloor. Je ne fais pas de la musique uniquement pour faire des bangers de club. Mais j’aime bien revisiter et remanier les morceaux que j’ai faits il y a un moment.

Un morceau de ton nouvel album s’intitule “Techno Disco”, est-ce une dynamique qui caractérise ta musique en général ?

 Ce sont les deux bouts du spectre, du moins pour la partie dansante de ma musique. J’en discutais avec les mecs de You Man il y a un mois, et ensemble on est arrivés au terme « dream techno disco », qui rassemble le côté planant de ma musique et les choses plus club, qui sont justement entre la techno et la disco.

Techno est un mot un peu fourre-tout. Il y a un club à Marseille, La Dame Noire, qui a bien résumé les choses, ils parlent de “dark disco/slow techno“. Pour moi, la techno c’est ça, une intensité, une certaine noirceur, une sensation, même quand elle n’est qu’à 120 BPM.

Ce côté “dreamy” dont tu parles évoque les aspects plus pop de ta musique, visible dans certains de tes remix, ou dans les morceaux de ce nouvel album en featuring avec les voix de Panama et Laumé. C’est un style qui a son importance dans ta musique ?

 Une jolie pop song, c’est toujours quelque chose de beau, quand c’est fait avec goût. Pour la partie plus calme de ma musique, quand ça s’y prête, je trouve ça toujours très intéressant d’avoir des voix, un peu à la manière de Jamie XX ou SBTRKT. J’aime assez l’idée d’un album de producteur qui puisse à la fois inclure de vraies belles pop songs et des morceaux beaucoup plus club.

Mais ce ne sont pas des chansons pop à la structure classique couplets et refrain, ce qui ne m’intéresse pas tellement. Je préfère la pop un peu plus expérimentale, ce que j’ai essayé de faire sur ce disque.

Avant la sortie de l’album le 27 septembre, une release party au Rex Club aura lieu le 19 septembre, peux-tu nous parler de cette soirée ?

 C’est la première fois que je jouerai mon live en club en France, c’est assez excitant de tester ce format différent du concert, je jouerai un peu plus techno pour l’occasion. Le Rex est une institution, et un des rares clubs à Paris où je n’ai jamais joué donc je suis très heureux d’y aller. Et très heureux aussi d’avoir Arnaud Rebotini et You Man à mes côtés. C’est un mélange dans lequel je me retrouve. Rebotini est une légende de la techno française, You Man, des jeunes producteurs qui montent. En plus Rebotini va jouer plutôt disco pour l’occasion, on retrouve ce pont techno-disco. 

Est-ce que tu travailles déjà sur de nouveaux projets ?

Je suis en résidence pour préparer le live qu’on présentera à Paris à la Maroquinerie en janvier, un événement qu’on annoncera le lendemain du Rex. Avec une scénographie inspirée du clip de “Mayans”. On voyagera avec notre installation lumineuse. Quand je fais de la musique, je ressens des choses que j’arrive très facilement à retranscrire en lumière, plus qu’en images. Je voulais plonger complètement le public dans mon univers.

Ce ne sera pas pour autant un live audiovisuel (AV) ?

Non, pour être honnête je déteste la vidéo sur la musique, parce qu’elle ne te permet pas de t’évader, et c’est ça qui m’intéresse dans la musique. C’est comme lire un roman, quand tu lis un roman tu imagines plein de choses, tu fais toi-même tes propres images et c’est hyper fort. Dès que tu transformes un roman en film, pour moi ça perd un peu d’intérêt, même si j’adore le cinéma. En tout cas pour la musique, je trouve que la lumière la met plus en valeur et permet vraiment de se perdre dans la musique, beaucoup plus qu’avec des images. Je travaille avec un ingé-light, pour préparer en amont différentes séquences que je contrôle pendant mon set, ce n’est pas un show light figé où tu appuies sur play et ça déroule. C’est assez flexible pour pouvoir s’adapter selon où je joue, une grosse salle, plutôt tard, où je vais accentuer le côté techno, ou le format concert plus calme. Ça fait 15 ans que je suis DJ, si je ne peux pas m’adapter c’est angoissant comme sensation. Parce que ça reste une histoire de partage, et c’est en s’adaptant que tu parviens au partage.

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