Tu fais partie du collectif féministe et transgenre Discwoman. Comment vous êtes-vous rencontré.e.s et quels point communs vous ont réuni.e.s ?
Le collectif Discwoman s’est formé au Bossa Nova Civic Club, aujourd’hui l’une des plus célèbres soirées de Brooklyn, un carrefour du mouvement des musiques électroniques à New York. À l’époque, il n’y avait aucun collectifs défendant spécifiquement les femmes sur la scène électronique, cela nous a donc semblé évident, et quelque chose dont nous avions cruellement besoin.
Au-delà de l’aspect politique de Discwoman, dont nous parlerons ensuite, penses-tu que la musique jouée par le collectif fait la différence dans le paysage électronique new-yorkais ?
Les artistes de Discwoman jouent une grande diversité de musique électronique et club. Chacun.e des membres a influencé notre scène locale à sa façon, au travers de soirées et de résidences, en repoussant les barrières des genres avec leurs sets éclectiques et leurs productions expérimentales. Mais une chose est sûre : le public de danseurs new-yorkais adore les artistes Discwoman, ils mettent à chaque fois le feu !
En quoi les événements Discwoman diffèrent-ils des soirées techno plus classiques ? Qu’apportez-vous en plus à votre public ?
Le public de nos soirées est toujours extrêmement plus diversifié que vos soirées techno habituelles. Comme tu peux t’en douter, il y a habituellement bien plus de femmes qui viennent, ce qui crée une ambiance très particulière. Il est important pour nous de protéger ce public et de les faire se sentir à l’aise dans le club, ce qui veut dire être parfois plus sélectif à l’entrée. C’est un vrai travail que d’obtenir le mélange de gens parfait sur une soirée, mais ça revivifie grandement l’expérience de la nuit.
Ressens-tu une différence entre l’Europe et les États-Unis à ce sujet ?
J’ai l’impression que les États-Unis sont à la tête du mouvement d’ouverture à une plus grande diversité sur le dancefloor, et dans la mise en avant des femmes et des personnes de couleur, mais je suis ravie que des collectifs européens comme Room 4 Resistance à Berlin, ou Siren à Londres prennent aussi la cause au sérieux.
On peut aujourd’hui voir un grand nombre de femmes DJ’s ou productrices prendre les platines et sortir des disques. Peut-on dire que l’ouverture d’esprit des musique électroniques est un terreau fertile pour une plus grande égalité entre les genres, voire pour l’abandon de la frontières entre les genres ?
Je pense qu’il est essentiel de continuer à soutenir et à mettre en avant des artistes femmes, pour que nous puissions bientôt dire qu’il y a une bien meilleure égalité des sexes dans la scène que disons il y a cinq ans. C’est un processus qui prend du temps pour que l’on en voit les résultats. Ces dernières années, nous avons vu ce sujet de discussion prendre de l’ampleur pour devenir l’un des discours les plus incontournables de cette industrie. Donc oui, on peut définitivement dire qu’il y a eu du progrès ! Je pense que la campagne du #MeToo a toutefois clairement montré que le harcèlement sexuel est un aspect et un souci majeur au sein des musiques électroniques. Toutes les femmes que je connais ont une histoire à raconter. C’est pourquoi Discwoman et les autres initiatives pour les femmes sont si importantes, pour transformer la culture club de fond en comble.
Tu aimes jouer acid, ou des choses électro et EBM breakées, plutôt que des morceaux techno basiques en 4/4. Pourquoi, selon toi, ce type de musique connaît une telle résurgence aujourd’hui ?
Je crois que la scène techno est arrivée à un point où la formule a été tellement répétée, tout a déjà été tellement dépouillé et copié, qu’elle en a perdu son sens. La résurgence des rythmes breakés, du funk, et de styles plus mélodiques ont été la réaction naturelle à la demande des danseurs pour une expérience musicale plus enrichissante.
Qu’attends-tu de ta soirée à Paris ?
Ce sera ma première fois à Paris donc je ne sais pas trop, mais j’ai lu beaucoup de choses sur la résurgence des sons plus durs en France, donc je pense que ce sera une soirée très excitante.
Et que peut-on attendre de toi ?
Que dire ? Ce sera un mélange d’électro sale avec des sons techno à l’influence punk, beaucoup d’acid et des choses dans l’esprit rave… Ça va vraiment dépendre jusqu’à quelles extrémités le public est prêt à aller !