À moins d’être un ami proche, bien difficile de connaître ce que renferme le cœur d’un musicien, au-delà des longues interviews offertes aux magazines spécialisés. Et même alors, les mots sont techniques, abstraits, ne laissant souvent percevoir que la surface. Avec 5elect5, Mino Kodama, une Allemande d’origine japonaise, a eu une idée simple mais brillante : demander aux DJs d’ouvrir le sac qu’ils promènent avec eux de ville en ville, d’aéroport en aéroport. Brosse à dents, godemichet, jeux vidéo, la web-galerie de cette designer pour Native Instruments devient un vrai cabinet des curiosités, hébergeant ces biographies d’un nouveau genre. « Après dix ans passés dans l’industrie musicale, je cherchais une nouvelle manière de faire des entrevues. Plutôt que de poser des questions, je laisse les artistes montrer ce qui est important pour eux ! Les meilleurs moments, c’est quand on découvre des objets inattendus comme des sextoys ou des sous-vêtements. »
Au cours de cette excursion intimiste, on découvre que Marc Houle n’est pas seulement un génie du live machines, capable de faire rimer acid house et imagerie vidéoludique. Il est aussi passionné de cuisine, une fine bouche qui prépare tous les plats qu’il mange : d’où la présence de deux énormes couteaux effilés dans son « sac », côtoyant sa Roland TR-8 customisée. « Ce n’est pas toujours un véritable sac. L’idée est surtout de rencontrer leur personnalité à travers cinq objets essentiels. Je pense que quelque chose de magique survient lorsque tu montres autant d’intérêt pour le travail d’un artiste que pour ce qu’il est vraiment. » Alors que son site fête sa centième rencontre, Mino, basée à Berlin, souligne qu’elle met un point d’honneur à rencontrer les acteurs de la scène électronique en personne, que ce soit chez elle, dans leur studio ou leur chambre d’hôtel. « C’est important de les découvrir hors du cadre des clubs. »
Le sac de Marc Houle
Au-dessus de la photo des sachets de thé que François X ramène d’une tournée en Asie, et alors qu’on apprend qu’il a aussi été tennisman professionnel, les mots avec lesquels la photographe décrit l’artiste témoignent d’une réelle passion. « Il est l’une des raisons pour lesquelles Paris est redevenue une capitale incontournable sur la scène électronique. » Mais son coup de cœur le plus tendre reste pour les dessins d’avion d’Objekt : « Il voyageait beaucoup étant petit, et faisait toujours un dessin de l’avion qu’il prenait, avant de le donner au personnel de bord. Une des plus belles surprises, ce fut quand Call Super ouvrit son sac, laissant voir l’un des dessins qu’Objekt lui avait dessiné sur une carte d’anniversaire, et qu’il emporte depuis avec lui. » Quant à la photo des mains qui accompagne chaque prise de vue, elle se veut le pendant essentiel de la série pour Mino. « Les mains sont les outils de leur œuvre, et selon la profession de chacun, elles disent beaucoup de soi et de son travail. Comme un autoportrait. »
Le sac de François X
Le sac de Call Super, avec le dessin d’Objekt
Le sac de Pan Daijing, avec son sextoy