The Cinematic Orchestra : retour sur les 20 ans de carrière du groupe mythique

Écrit par Trax Magazine
Photo de couverture : ©D.R
Le 22.03.2019, à 11h12
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On ne sait pas tout à fait si The Cinematic Orchestra est un groupe ou un collectif. Ce qui est certain, c’est qu’il est emmené par Jason Swinscoe, et que depuis ses débuts il y a vingt ans, il est passé par plusieurs phases et évolutions qui ont construit une discographie solaire. Du jazz bouclé au rap en passant par les orchestrations massives du London Metropolitan Orchestra, voici dix morceaux qui symbolisent la richesse d’une discographie encore en construction et en réflexion, et complétée le 15 mars dernier du nouveau To Believe.


Par Brice Miclet

1999 : “Ode To The Big Sea”

Où se situent les racines de The Cinematic Orchestra ? Un peu dans la house, musique que la tête pensante du collectif, Jason Swinscoe, mixait quand il officiait comme DJ dans les clubs de Londres. Mais avant tout dans le jazz. Leur premier album, Motion, sorti il y a vingt ans, s’ouvrait avec “Ode To The Big Sea”, sur une batterie pleine de ride et une contrebasse effrénée, plaçant d’emblée le son du collectif entre les arrangements présents chez John Coltrane et la science de la boucle. Un jazz expérimental, empreint d’harmonies de cuivres lancinantes, et les débuts d’une discographie en perpétuelle évolution.



1999 : “Diabolus”

Alors oui, il y a “Ode To The Big Sea”, porte d’entrée vers la musique du groupe. Mais sur ce premier album, le titre le plus prenant est très certainement “Diabolus”. Une ode à la lenteur et à la répétition. Autour de deux accords, The Cinematic Orchestra exploite une recette musicale qui deviendra un credo : dans les boucles, dans les thèmes répétés, il y a l’importance des variations, de la progression, qui font ressortir les subtilités. “Diabolus”, c’est le morceau le plus hypnotique présent sur Motion, neuf minutes qui se terminent par une seconde partie totalement débridée, et inoubliable.



2002 : “Burn Out”

Deux ans après Motion, Jason Swinscoe et sa bande reviennent avec une formule similaire sur l’album Every Day. Cette fois, on discerne bien plus l’importance de l’électronique dans leur musique, notamment via le sampling. Sur “Burn Out”, on entend cette voix habitée se complaindre au milieu de synthés et de sons analogiques mystérieux. Cette époque est aussi celle qui marque les débuts de leur collaboration avec Fontella Bass, chanteuse de soul américaine qui posera sa voix sur plusieurs titres majeurs de leur discographie.



2003 : “All Things”

En 2003, The Cinematic Orchestra se lance dans un projet assez farfelu, mais qui s’avère aujourd’hui être leur plus réussi : la confection d’une nouvelle bande originale d’un film russe muet de Dziga Vertov, Man With A Movie Camera, sorti en 1929. Les cordes y auront une importance capitale. Ce sont elles, et le piano, qui permettent les changements d’ambiance nécessaires à la confection de ce superbe album. Sur “All Things”, il y a quelque chose d’à la fois épique, mais aussi de très terre-à-terre, avec ces scratchs sortis de nulle part. Une pièce maîtresse du groupe.



2003 : “The Magician”

Avec The Cinematic Orchestra, on est habitués aux grandes orchestrations, à la masse d’éléments sonores. Sur “The Magician”, extrait de la bande originale de Man With A Movie Camera, il n’y a rien de tout cela, et c’est assez rare pour être souligné. Les 2’27 minutes qui sont ici livrées ne contiennent qu’un piano simpliste, que l’on imagine sans difficulté habiller les scènes du film.



2007 : “To Build A Home”

Douze ans après la sortie de l’album Ma Fleur, on reparle encore à Jason Swinscoe de ce morceau comme celui d’une carrière. “To Build A Home”, en duo avec le chanteur canadien Patrick Watson, est le principal succès de The Cinematic Orchestra. Il faut dire que ce titre contient à lui seul un nombre important d’éléments ayant fait la réputation du groupe : une collaboration en symbiose, une linéarité brisée par des variations superbement amenées… Une pièce dont Jason Swinscoe aura du mal à se défaire.



2007 : “Music Box”

Sur Ma Fleur, il y a aussi des ovnis, à l’image de “Music Box”. Il n’existe aucun autre morceau dans la carrière de The Cinematic Orchestra qui soit autant centré sur les guitares acoustiques, qui soit une pièce entièrement dédiée à cet instrument. Hypnotique, ce titre fait office de respiration dans l’album, vient se coller au milieu des arrangements volumineux et des expérimentations. Ici, c’est la voix de la chanteuse anglaise Lou Rhodes qui vient terminer de nous bercer, première d’une série de collaborations entre l’artiste et le groupe.



2010 : “Talking About Freedom”

Il ne s’agit pas ici de l’un des meilleurs morceaux de The Cinematic Orchestra. Ce qui est intéressant, c’est que “Talking About Freedom” se situe au beau milieu de la compilation Late Night Tales, dont Jason Swinscoe est l’initiateur en 2010. On y trouve Flying Lotus, Björk, Steve Reich ou encore Burial, dans des délires plus ou moins inégaux, il faut bien l’avouer. “Talking About Freedom” est l’un des rares titres de cette liste à être composé et interprété par The Cinematic Orchestra.



2010 : “Arrival Of The Birds”

En 2010, Jason Swinscoe enregistre à New York un album qui, finalement, ne verra jamais le jour. La faute à un feeling qui ne passe pas et à une ville qu’il peine à apprivoiser. Pour stopper ce déficit de créativité, il se met à travailler pour Disney sur la bande originale du documentaire The Crimson Wing : Mystery Of The Flamingos, axé sur un groupe de flamands roses. Au début du film, le titre “Arrival Of The Birds” retentit, et correspond à l’image : au fur et à mesure que les oiseaux s’agglutinent, des instruments se rajoutent en fond sonore, jusqu’à former un orchestre entier (le London Metropolitan Orchestra est réquisitionné pour l’enregistrement, rien que ça) qui finit par s’envoler. Peu de morceaux du groupe sont aussi visuels.



2019 : “A Caged Bird/Imitations Of Life”

Après douze années d’absence, The Cinematic Orhestra est revenu avec le magnifique album To Believe. Le single “A Caged Bird/Imitations Of Life” est imprégné d’influences électroniques, beaucoup moins expérimental que ce à quoi le groupe nous avait habitué. Ce qui n’est pas nécessairement une mauvaise chose, d’ailleurs. Ce titre est une réussite totale, en grande partie due à la participation de leur collègue pensionnaire de Ninja Tune, le rappeur anglais Roots Manuva. Lors de sa sortie en single, le titre est vendu sur les plateformes, mais l’achat par l’utilisateur le renvoie à une page internet lui indiquant les disquaires vendant le morceau en physique. Une belle tentative de faire décrocher son public des smartphones.

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