Le 6 décembre, le gouvernement français annonçait la refermeture des boîtes de nuit face à la cinquième vague de contaminations et l’apparition du variant Omicron. Censés rester clos jusqu’à « début janvier », les clubs et leurs professionnels sont globalement gagnés par un sentiment d’injustice face à ces nouvelles restrictions. Cette refermeture représente en effet des conséquences économiques dramatiques pour le secteur (20% du chiffre d’affaires annuel de certaines boîtes de nuit se font à cette période de l’année) alors qu’il peinait déjà à rattraper les dommages engendrés par 16 mois d’inactivités. Mais c’est aussi le fait d’être les seuls à fermer, contrairement aux bars, restaurants ou salles de concert restés ouverts, qui rend la pilule difficile à avaler.
Ces nouvelles mesures s’appuient sur une enquête menée l’été dernier, indiquant des chiffres alarmant sur l’incidence de contamination dans les clubs. Mais les premiers résultats d’une étude de l’ANRS redonnent un peu d’espoir…
Selon l’Institut Pasteur : c’est pas terrible
Lieux clos, non-ventilés pour la plupart, dont l’activité principale rend impossible le respect des gestes barrière, il était évident que les clubs seraient les premiers à fermer face à une recrudescence du taux de contaminations. Une étude menée par l’Institut Pasteur avec la Caisse nationale de l’assurance-maladie, Santé publique France et l’institut Ipsos, s’est intéressée aux principaux lieux et circonstances de contamination de la Covid-19. Elle concluait notamment que la réouverture des boîtes de nuit le 9 juillet avait multiplié le risque de contamination par 7,9 chez les moins de 40 ans, et par 2,7 chez les plus de 40 ans.
C’est donc principalement sur ces chiffres que s’est basée la décision du gouvernement de faire porter aux clubs et discothèques seulement (et pas aux autres lieux accueillant du public) le poids de ces nouvelles contraintes. Mais cette étude comporte toutefois une limite importante, reconnue d’ailleurs par ses auteurs : elle a été réalisée entre mai et août, à un moment où les mesures sanitaires et sociales étaient en train d’être mises en place, la majorité des établissements encore fermés, et le taux de vaccination (notamment chez les jeunes) encore très faible.
Selon l’ANRS: c’est pas si mal
Une autre étude, menée cette fois-ci en octobre par l’ANRS-Maladies infectieuses émergentes dans le cadre de la soirée “Reviens la nuit” organisée à La Machine du Moulin Rouge, a employé une autre méthode… et obtenu des résultats différents. Alors que l’étude ComCor de l’Institut Pasteur s’appuyait sur des questionnaires remplis par des personnes déjà infectées, l’étude ITOC (“Indoor Clubbing Transmission of Covid-19”) est dite “interventionnelle” et impliquait un échantillon de personnes volontaires pour participer à une expérience dans un but scientifique. Deux groupes d’individus, tous vaccinés, se sont faits tester à une semaine d’intervalle, un groupe ayant participé à la soirée en club entre temps, l’autre pas.
Si les résultats n’ont pas encore été publiés (ils feront bientôt l’objet d’une publication scientifique), Le Monde a pu en consulter les premiers et relaie « qu’il n’y a eu ni cluster ni aucun élément prouvant une surcontamination des participants pendant cette soirée-test » et témoigne de « premiers résultats (…) plutôt rassurants », reprenant les propos de Jérémy Zeggagh, médecin au service de maladies infectieuses de l’hôpital Saint-Louis. Cependant, cette nouvelle étude fait face aux mêmes problématiques temporelles que la première : la situation a encore évolué depuis octobre et il est impossible de garantir des résultats similaires aujourd’hui, avec un taux d’incidence plus élevé et un variant plus transmissible.
S’il est difficile de suivre en temps réel les impacts des mesures sanitaires sur l’évolution du virus et les risques que comportent nos pratiques, ces études scientifiques ont quand même le mérite de fournir à un instant T des données significatives qui guident les décisions du gouvernement. Leur influence sur les mesures appliquées est réelle. Elles sont donc à encourager et à poursuivre, et d’autres pistes sont encore à approfondir, comme notamment celle de la ventilation des lieux clos.