Cet article a initialement été publié en 2017 dans Trax n°206, disponible sur le store en ligne.
Ta dernière histoire d’amour ?
Je me dois d’être romantique : c’est avec Lili Wood, ma femme depuis huit ans, avec qui j’ai deux enfants. Sur Créatures (2014), elle dessinait en écoutant ce que je composais à la maison. Là, pour Mirapolis, c’était l’opposé : je me suis coupé du monde, et en particulier de ma famille. J’avais du mal à travailler chez moi ou au studio, et elle m’a encouragé à partir. Je suis allé dans le premier hôtel face à la mer que j’ai trouvé sur Internet, et j’y suis resté dix jours. Puis, je suis rentré, et je suis reparti aussitôt. J’ai travaillé avec très peu de matériel dans des lieux complètement isolés.
Ton dernier rêve ?
Je ne me souviens pas vraiment de mes rêves, c’est frustrant. Par contre, j’adore cette sensation d’être à moitié endormi et de prolonger le rêve. Moi qui étais insomniaque, j’ai d’abord fait de la musique la nuit, en rentrant de soirée un petit peu stone. J’avais l’impression que ça m’aidait à faire des choses un peu barrées. J’ai un rythme un peu différent maintenant, et je me rends compte que cet état de semi-conscience hyper intéressant, où tu te laisses porter par tes émotions, c’est la même chose le matin au réveil. Les surréalistes, Jean Cocteau, tous ces gens qui utilisaient le rêve pour créer, ou même Michel Gondry, avec ses films qui ressemblent à des rêves éveillés, c’est quelque chose qui me parle énormément.
Ta dernière drogue ?
Ah, je crois que c’était… On peut parler de ça, oui ? Je crois tout simplement que c’était de la MDMA (rire). Bon, je vais trouver quelque chose de plus poétique. Pour cet album, j’ai eu une vraie attirance pour la mer. Dès que je rentrais à Montreuil terminer les morceaux que j’avais commencés face à la mer, je ressentais comme un appel pour y retourner. Donc, la drogue, ce serait l’iode, l’air de la mer.
Ta dernière décision pour prendre soin de toi ?
Pendant mes premières tournées, je faisais n’importe quoi, j’étais ivre tous les soirs. Là, une tournée assez impressionnante arrive, avec 150 dates qui s’enchaînent, et je me suis dit : « OK, il va falloir mener une vie assez saine ». Pas de bière avant le show, et une petite coupe ou une connerie après. Avec l’expérience, j’anticipe, parce que ça va être costaud.
Ta dernière idole ?
Ça, c’est dur… Ce qui me vient spontanément, c’est l’écrivain Alain Damasio qui est un ami, et Michel Gondry, que j’ai rencontré pour cet album et qui m’a proposé de faire la pochette. Deux univers complètement différents qui fusionnent en moi, me donnent des ailes, m’inspirent. Quand on est jeune adulte, on est hypersensible de manière générale et à la musique en particulier. Mes vraies idoles, ce serait Erik Satie, Miles Davis et Aphex Twin, je crois que ça m’a vraiment marqué à cette époque-là. En fait, ce sont des dieux tout court, ils sont intouchables.
Ta dernière grosse frayeur ?
J’ai vraiment flippé quand mon petit garçon a fait des petits malaises, qui étaient en fait des crises d’épilepsie. Avant qu’on sache ce que c’était, on a passé cinq jours horribles à l’hôpital, la pire peur de ma vie ! Avant, j’étais très anxieux pour tout et là, tout le reste te paraît dérisoire.
Ton dernier livre ?
Il y a une époque où je lisais énormément, et avec la tournée, l’album, j’en oublie de prendre des petits moments. Pareil pour le cinéma, je regardais trois ou quatre films par jour et je ne suis pas allé au cinéma depuis six mois. Mais pour le livre, disons évidemment Damasio, qui, à travers un roman de science-fiction qui a l’air orienté ado, ouvre des portes, voire tout un univers philosophique : Nietzsche, Deleuze. Il rend accessible à tout le monde les concepts de ces philosophes.
La dernière proposition artistique bizarre ?
Il y a un producteur de cinéma qui m’a écrit dernièrement, il me dit qu’il est fan de ma musique, et termine par cette proposition : « Est-ce que ça t’intéresserait de faire un film ? Est-ce que tu as des idées de scénarios ? » C’est compliqué de monter ce genre de projet, et le mec me propose de faire un film alors que je n’ai rien demandé ! J’ai d’abord pensé que c’était une blague, j’ai regardé sur Internet et pas du tout, c’était bien M. Weinstein ! (Rire.) Non, c’est un producteur français, mais l’idée m’a vraiment surpris. J’ai aussi envie de plonger dans l’univers des bandes originales, mais je veux trouver le bon scénario. Et on m’a proposé un scénario pas mal, pour un long-métrage…
Ton dernier album ?
J’en suis vraiment content de bout en bout. Avec le recul, ce n’est pas le cas pour tous mes disques, mais celui-là, j’ai hâte de le sortir. C’est un album de musicien électronique, parce que mes instruments sont mes ordinateurs et mes machines, mais qui tend à aller un peu au-delà avec des collaborateurs qui viennent d’univers très différents, pour faire un objet un peu bizarre.
Tes derniers mots ?
Oh je dirais… « Quand même, c’était bien ». (Rire.)
Du 5 au 14 mars 2020, RONE disposera d’une carte blanche au Théâtre du Châtelet au cours de laquelle il présentera un nouveau projet de live. La billetterie est d’ores et déjà ouverte.