[Reportage] Festival OYÉ : ce jour où les arts numériques ont envahi une tour de béton

Écrit par Thémis Belkhadra
Le 30.06.2016, à 16h49
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Écrit par Thémis Belkhadra
Samedi 18 juin, la ville de Saint-Denis brillait des phares d’OYÉ. Sous ce nom se cache un groupe de jeunes passionnés de sons et de lumières, qui entendent donner plus d’espace à l’art visuel dans le monde de la nuit. Après avoir collaboré avec les collectifs Runtomorrow, Vryche House ou Parallele, l’association a donné vie à son premier festival au 6b, sous le soleil, les gouttes puis la lune d’un mois de juin parisien. Avec des installations étonnantes, et des performances à couper le souffle, OYÉ, qui aura carte blanche sur le stand Burn au prochain Peacock Society, réussit le pari de s’imposer comme une pointure parisienne de l’art visuel.Photos par Thémis Belkhadra

OYÉ Festival était la première production home made du collectif OYÉ, qui compte en son sein deux groupes distincts. OYÉ Visual art label est la partie créative et productive du collectif dédié aux arts visuels. OYÉ Factory est consacrée à l’organisation d’événements festifs. Dans son ensemble, le collectif OYÉ a pour objectif la rencontre des arts numériques et de la musique électronique dans le but de rendre au visuel toute son importance dans l’expérience de la nuit. Pour le fondateur Paul Vivien, il est question de sortir de la « plate illustration », de « mettre en égalité ces deux arts, pour créer quelque chose d’inattendu ».

C’est au 6b que le groupe de jeunes gens a eu l’idée d’installer sa grosse machine – qui mêlait expositions, ateliers, performances audiovisuelles et musiques barbares. Encore une fois, quel meilleur espace pour s’adonner aux joies de la fête et de l’expérimentation artistique ? Pour apprécier le spectacle, il fallait venir tôt, d’autant qu’il n’en coûtait pas une thune avant 16 heures.


© Charline Dally

Plusieurs installations de qualité habillaient la salle d’exposition, ouverte jusqu’à 22 heures. OYÉ y était représenté par Charline Dally. Elle exposait son installation Ilah, qui invite à la réflexion autour du lien qui unit les êtres humains entre eux, « un totem pour reconnecter les personnes entre elles » selon l’artiste. Elle était accompagnée d’autres talents comme Aurélie Vial, qui présentait Black Box : une expérience sensorielle mêlant son, image et numérique. Grâce à plusieurs écrans, l’installation immerge le spectateur dans un tourbillon géométrique, réaffirmant le lien intrinsèque qui existe entre son et image.

L’œuvre de Simon Lazarus, Logor était aussi impressionnante. Composée d’un « volcan/pixel pyramidal », l’installation voyait une pluie d’images colorées et lumineuses se déverser du haut vers le bas en augmentant sans cesse l’intensité. Mais l’installation la plus surprenante était peut-être celle de Corentin Osouf, Essence picturale. Cette dernière explorait le lien entre l’art ancien et contemporain en donnant vie à un tableau de nature morte grâce au techniques de mapping. La vidéo parle d’elle-même.

Après cette longue errance dans la salle d’exposition il est déjà temps d’admirer le live de Bloum, sur la plage du 6b. Alors que la façade du bâtiment s’habille des belles formes colorées de Kaleidos, un sol de palettes nommé POOL s’illumine. On s’asseoit quelques minutes sur cette installation signée NONOTAK Studio pour admirer le va-et-vient des lumières. Et enfin, les premières notes de Bloum. Pendant tout le reste du festival, tout le monde n’aura que ce souvenir à la bouche, et il y avait de quoi être émerveillé.

Cinq artistes produisent ensemble un live immersif, dans lequel le son et l’image se rencontrent à nouveau. Une ambiance funky et colorée explose, aux accents parfois acides et nourrie par les mélodies d’un sax, d’une guitare électrique mais aussi d’une flûte traversière. Une musique originale, précise et entraînante qui sonnera le début de la partie nocturne du OYÉ Festival.

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C’est ensuite un véritable rodéo sur une bande-son violente et musicale qui démarre entre les deux étages et les quatre salles du 6b. On commencera par la prestation de Karamel. Le résident et cofondateur de Parallele n’en finit d’ailleurs plus de s’améliorer. Avec une sélection judicieuse, le jeune DJ va littéralement brûler le sol du rez-de-chaussée.

On ne bougera pas de notre coin tranquille, à côté des enceintes, jusqu’aux dernières notes de son track de closing. Derrière lui, c’est une installation en string art de plusieurs mètres qui fait le lien avec OYÉ. Réalisée à l’aide de torchons enroulés, elle procure du relief à une projection VJ – qui manquait peut-être de luminosité. Mais pourquoi voir les nuages sous le soleil ?

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Karamel passe la main et nous prenons l’escalier. En haut, Leo Minasso balance un live techno étonnant de technique pour ce jeune débutant indépendant. À ses côtés, la résidente d’OYE, Tallulah Frappier, habille sa techno de motifs picturaux et de dessins. Leur collaboration transporte le public dans un univers coloré, l’invitant à user de son imagination pour vivre l’expérience de la nuit autrement. On ne bougera pas jusqu’à l’attendue prestation de SHXCXCHCXSH (aucun rapport avec le rappeur du même nom) et de leur VJ Pedro Maia.

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Ensemble, ils produiront un voyage audiovisuel de très haute volée, en guise de présentation de leur nouvel album SsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSs. Moins étrange que le nom de leur projet, leur prestation charme immédiatement la foule, en mêlant une techno brute et excitée, presque monstrueuse d’intensité, à des coulées de couleurs, hésitant entre le fluo et le pastel et se déversant sur les larges murs du 6b. Le visuel se saisit alors de l’espace et n’hésite pas à venir caresser le visage des danseurs en transe.

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Il est donc 4 heures. Le moment de s’aérer sous une lune lumineuse, face à la façade toujours aussi animée du 6b. Retour sur POOL, toujours aussi fascinante. S’en suivra une aventure aux quatre coins du bâtiment dont on ne garde que des souvenirs flous… Au sortir du 6b, les yeux sont écarquillés, stupéfaits de tant de beauté et d’innovation de la part des deux têtes de l’association OYÉ.

Pour un premier événement, on en gardera un très bon souvenir. Et on attend avec impatience la prochaine rencontre avec ce beau groupe de jeunes gens créatifs et déterminés. On quittera tout de même le bâtiment, la boule au ventre, tristes de savoir que cette nuit était la dernière dans ce temple artistique qu’est le 6b.

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