Rencontre avec Olympe4000, DJ et productrice engagée à la fougue inarrêtable

Écrit par Kenza Naaimi
Photo de couverture : ©DR
Le 29.04.2022, à 09h14
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Écrit par Kenza Naaimi
Photo de couverture : ©DR
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Visio avec vue sur la mer : c’est à Bordeaux qu’on a réussi à attraper Olympe4000 pour revenir sur son parcours. Entre deux cours de mix, cette DJ de la scène émergente et à suivre de très près, nous raconte ses premières sorties en club, ses plus grandes influences et ses toutes premières scènes… Un début tonitruant qui débouche aujourd’hui sur une résidence au Badaboum, à Paris, où on pourra la retrouver dès ce week-end aux côtés de DJ Assault.

Habituée à apprendre la musique, Olympe4000 explore aujourd’hui le goût de faire apprendre, même si cette hargne de la transmission ne date pas d’hier, et qu’elle n’en est pas à ses premiers cours. « J’aurais adoré qu’on me donne tous ces conseils plus jeune. Il faut apprendre à mixer, oui. Mais c’est important d’avoir une visibilité globale du métier, et de la scène. C’est important de présenter tout l’écosystème de la musique électronique, pas que le mix, mais connaître ce qu’est un booker, un manager, la gestion d’image, le démarchage. Tout le reste du métier qu’on ne voit pas… »

Si ses débuts dans la musique nous ramènent à l’époque du conservatoire, lorsqu’elle y apprenait la batterie et montait un groupe de jazz avec son frère, la diversité des influences d’Olympe4000 explique surtout l’éclectisme de ses sets. C’est pour dire : depuis ses 13 ans, elle possède sa propre collection de vinyles. Des disques qui vont du jazz, à la soul, au funk en passant même par le disco. Et dans une suite complètement logique, ça n’est que quelques années plus tard qu’elle se mettra à mixer pour la première fois sur des platines vinyles. Quand la plupart des amateurs du DJing commencent aujourd’hui par le digital. « J’attendais beaucoup de mes potes mecs qui mixaient, je leur demandais souvent s’ils pouvaient m’apprendre, et à force d’attendre, de ne pas trop pouvoir compter sur eux, j’ai laissé passer beaucoup de temps. J’ai trop couru après eux, puis un jour je me suis dit : je vais m’y mettre, sur digital, toute seule », rembobine-t-elle. Seulement, apprendre à mixer, c’est comme apprendre un nouvel instrument : seul.e ça reste très compliqué. Olympe4000 louera alors longtemps des studios parisiens pour avoir accès à la pointe des CDJ’s à prix abordable. Mais c’est surtout sa rencontre avec le DJ Aurèle qui changera la donne : il deviendra une sorte de mentor pour tout ce qui concerne la technique du mix, et toutes les petites astuces à connaître qui l’ont permise de se lancer dans l’enregistrement de son premier set.

Un premier set diffusé après s’être créé son compte sur SoundCloud, mis en lien dans un mail, puis envoyé à un grand nombre de bars à Paris. « Je ne connaissais personne dans le milieu de la musique électronique, et je ne viens pas du tout de ce milieux donc j’ai dû m’enregistrer un petit mix sur SoundCloud et j’ai démarché clairement tous les bars de Paris. J’étais particulièrement déterminée à l’époque. » C’est en faisant ces premières dates qu’Olympe fait la rencontre de ses paires DJs féminines : « J’étais hyper étonnée de la sororité présente entre les meufs. J’avais peur de la compétition, de la comparaison qu’on pouvait s’auto-imposer, et là pas du tout. C’est là que tu vois qu’on évolue entre femmes, aujourd’hui on se sert vraiment les coudes ». Touchée par le manque de visibilité de la gente féminine sur la scène électronique, elle organisera en plein confinement son propre festival de musique électronique pour lutter contre la précarité menstruelle. Le Sisterules Festival fera ainsi défiler plus d’une quarantaine de femmes du monde entier sur les ondes de la webradio Scandle.

Inspirée par ses premières raves en périphérie de Paris puis par ses soirées au Rex, à La Machine du Moulin Rouge ou encore au Zigzag ou au Showcase, ce sont des morceaux techno énervés, au lourd BPM que l’on pouvait entendre dans ses premiers sets : Recondite, DVS1 ou les artistes du label Innervision. Mais aujourd’hui, sa sélection s’est bien élargie. « Je n’arriverais pas trop à dire quel style je mixe ou ce que je vais jouer le jour même, ça peut partir dans tous les sens et je peux changer d’avis au dernier moment. Je fais vraiment pleins de trucs différents, mes mixes sont très éclectiques. Ça peut aller de la UK, la bass, la techno, la house, la trance, la jungle, la juke ou même l’eurodance si j’en ai envie. » Une palette large et éclectique, sans doute décomplexée par les nombreux voyages qu’a pu faire l’artiste : Hyderabad en Inde, Barcelone, New York, ou encore Kinshasa où elle aura même lancé les tonitruantes soirées Makinteufs… Olympe4000 est plutôt du genre à lire la foule, faire des tests, voir ce qui prend tout en faisant les choses à son image. Faire plaisir au public toujours, sans jamais se conditionner. Une énergie imparable que l’on pourra notamment apprécier ce vendredi 29 avril au Badaboum, dans le 11ème arrondissement de Paris, où la DJ se voit confier une grande carte blanche. Pour cette première, elle y invite l’un des pères de la ghetto-techno, DJ Assault, ainsi que son père musical à elle, Aurèle.

Olympe4000 profite notamment de cette résidence de 3 dates pour prendre en main la programmation et inviter les artistes qui lui plaisent et à qui elle a envie d’offrir plus de visibilité, mais pas que. On sent aussi une prise de position importante dans la direction artistique, avec l’univers de la soirée imaginé aux côtés d’une graphiste du studio amann. Une soirée où la sueur, la transpiration sont omniprésents. Comme une libération des corps et des esprits en mouvement. « Une résidence c’est un tout pour moi, ça n’est pas juste le line up. T’as le graphisme, la musique, l’ambiance, le message que tu veux transmettre derrière… La musique électronique est politique et doit rester politique, non-conformiste, dissidente et remettre en cause les valeurs dominantes au sein d’une société », affirme-t-elle. Le but de cette soirée, c’est aussi de mettre en place une fête safe, sereine et responsable avec des équipes formées, accessibles et sensibilisées aux potentielles agressions. Ainsi que des personnes référentes qui seront présentent en cas du moindre problème. « C’est du travail de fourmi, mais j’ai vraiment envie que les gens se renseignent, s’informent sur ces problématiques là et que la teuf change. »

En attendant les prochaines dates de sa résidence, en septembre puis en janvier 2023, on peut désormais écouter les talents de productrice de l’artiste, puisqu’Olympe4000 s’est récemment mise à la composition. Une nouvelle casquette, qui lui va bien, et via laquelle elle continue de nourrir son amour pour la musique. Le 22 avril sortait justement l’un de ses nouveaux tracks sur le label Maison Close, “We Never Work” en feat avec Aasi, et un nouvel EP serait actuellement en préparation… Vous êtes prévenus, Olympe4000 n’est pas à perdre de vue.

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