Qui est Graham Dunning, cet Anglais qui fait de la techno en faisant tourner des objets sur ses platines ?

Écrit par Quentin Sedillo
Photo de couverture : ©D.R
Le 07.11.2018, à 16h49
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Écrit par Quentin Sedillo
Photo de couverture : ©D.R
Avec Mechanical Techno, Graham Dunning signe une musique qui brise les codes de production habituels. En utilisant les objets les plus désuets, qu’il assemble sur le pivot mobile d’une platine, il crée une installation organique qui questionne l’essence du procédé de création. C’est tout naturellement qu’il a été invité à se produire à Électrons Libres, évènement dédié aux expérimentateurs audio-visuels le 29 novembre prochain à Stereolux à Nantes.


“Je pense que si tu te considères non pas comme un musicien, mais comme un artiste sonore, cela t’ouvre bien plus de possibilités. Tu peux présenter ton œuvre de bien plus de manières différentes”. Ces mots sont ceux d’un amoureux du concept, passionné par tous les arts : Graham Dunning.

S’il a bien été musicien dans sa jeunesse au sein d’un groupe de punk et s’il fut influencé par Aphex Twin et de la musique plus abstraite, le Britannique né en 1981 nourrit depuis la tendre enfance un intérêt bien plus vaste, celui de “créer des choses”. Des Lego à la réparation de vélos, Graham Dunning, l’auteur de la performance “Mechanical Techno”, a toujours été passionné par “le fait de faire”. Et bien qu’il n’ait jamais étudié la musique académiquement, il enseigne désormais les arts sonores expérimentaux au Mary Ward Centre à Londres. Auteur de multiples installations, de performances conceptuelles, (comme Music by the Metre ou Marbles) qui ont bâti sa réputation de véritable artiste contemporain, son œuvre est le fruit du travail d’une oreille avertie, tout autant que d’un artiste global, soucieux d’analyser, de déconstruire l’intégralité du processus de création.

Dans ses performances, pas d’instrument à proprement parler, mais des objets, récupérés ça et là. Dans son monde, les disques existent, mais moins pour la musique qu’ils diffusent qu’en tant que concept, pour leur fonction première : tourner. Mechanical Techno, sa dernière installation, prend le contrepied de l’irrémédiable précision des productions par ordinateur. Plusieurs vinyles forés, découpés, fixés à la main sur un socle en forme de tour, actionnent en tournant différents sons, cloches, micros, cymbales reliés par des câbles, dans une symphonie techno organique et imparfaite, en perpétuelle mutation. “Cette imperfection, c’est cela que je recherche. Une machine ou un ordinateur ne permettent en vérité que certaines manières de produire. La plupart des musiciens s’habituent à celles-ci, et ont finalement déjà en tête la musique qu’ils vont produire lorsqu’ils s’apprêtent à jouer. Je ne fonctionne vraiment pas comme cela”.

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Dunning préfère en effet laisser la musique émerger d’elle-même. Sans être un latent spectateur, il choisit de “l’orienter et observer”, ajoutant un élément puis un autre sur ce qui semble être un jeu de construction. Les pièces varient, d’un simple microphone à de véritables billes ou balles de tennis de table. Le lien avec l’enfant collectionneur, qui “ramassait coquilles de noix ou bouts de papiers, pourvu qu’ils soient intéressants”, est tracé. Une légère erreur de positionnement, une surcharge d’objets, ou bien la pesanteur naturelle de l’un d’entre eux entraine parfois une arythmie, un accroc. Et c’est ce qui rend sa “techno mécanique”, faite de fils de fers et de plastique presque humaine. À l’instar d’un Ghost in the Shell, mi conscience mi robot, qui oscille entre liberté et déterminisme, son installation soulève la question des limites dans le procédé artistique. “Je choisis mon système arbitrairement. Et c’est grâce aux limites qu’impose cet assemblage physique que j’arrive à explorer les choses en profondeur. Quand il est trop facile de parvenir à ses fins, on ne produit que des choses génériques”.

Graham Dunning présentera “Mechanical Techno” à la soirée Electrons Libres le jeudi 29 novembre prochain à Stereolux à Nantes.

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