Pourquoi les Toulousains de Boussole Records offrent-ils tous leurs disques ?

Écrit par Théodore Hervieux
Photo de couverture : ©Louis Derigon
Le 27.06.2016, à 20h07
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©Louis Derigon
Écrit par Théodore Hervieux
Photo de couverture : ©Louis Derigon
Un label qui laisserait toutes ses releases en accès libre ? C’est le pari un peu fou lancé par le crew toulousain de Boussole Records depuis plus de trois ans. Si le concept n’est pas nouveau, il reste rare, assez pour qu’on s’intéresse au pourquoi et au comment de cette initiative, qui a d’ores et déjà permis au collectif de sortir 26 releases – digitales et physiques – à prix libre.


Boussole Records, c’est avant tout une histoire d’amis de longue date, qu’on vous avait présentés il y a peu dans nos colonnes. Mais après plus de trois ans d’activité, c’est aussi et surtout un collectif devenu incontournable dans le paysage des soirées toulousaines. À la tête d’une impressionnante collection de productions (26 sorties physiques et digitales), au spectre aussi large que qualitatif, le crew a délibérément décidé de laisser toutes ses musiques en accès gratuit sur Bandcamp, chacun étant libre de donner en fonction de ses moyens et de ses envies. Stratégie marketing ou pur altruisme ?

La troisième compilation du collectif, sortie le 15 juin dernier :

L’idée n’est pas nouvelle. De tout temps, des groupes ont pu distribuer des disques gratuitement à la fin de leurs concerts, et derrière la gratuité se cache parfois un modèle économique florissant. En 2009, le site Korben retraçait la success story de Corey Smith, un Américain devenu millionnaire en faisant payer ses concerts seulement 5 dollars et en offrant la quasi-totalité de sa musique sur Internet, la gratuité permettant d’accroître la base de fans de manière exponentielle. Un cercle vertueux, en somme.

“Si on fait tout ça, c’est parce qu’on a envie qu’un maximum de gens écoutent notre musique”, explique clairement Antonin, le patron de Boussole. “Quand on a commencé nos soirées, on a vite constaté que lorsqu’il y a un prix sur une musique que les gens ne connaissent pas, ça met un frein. Du coup, on a cherché à retourner le problème en filant nos tracks, et en trouvant d’autres moyens d’être rentables que par nos productions physiques et numériques – parce qu’il faut quand même financer les artistes, n’oublions pas.”

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Mais où trouvent-ils l’argent ? Essentiellement grâce aux soirées qu’on organise depuis un peu plus de trois ans. Tous les bénéfices sont automatiquement réinvestis dans le projet, on ne touche rien à titre personnel. Ça nous permet tout juste de presser les CD et de rémunérer les artistes”, assure Antonin, qui concède : “C’est clairement un modèle économique un peu fragile, mais ça permet de faire vivre le label et de financer les projets qu’on a envie de mener.”

Le podcast de Boussole, il y a deux jours sur les ondes de Rinse :

Une stratégie qui reste rare dans le paysage musical (presser des CD gratuitement n’étant pas forcément le credo de jeunes collectifs électroniques habitués au tout digital), et qui contraste avec les combines de certains labels de house roumaine – pour ne citer qu’eux – qui ont tendance à considérer la rareté comme un synonyme de qualité, en maintenant systématiquement l’offre en deçà de la demande.

“C’est une autre stratégie, qui d’ailleurs marche très bien. Mais de notre côté, on cherche plus à faire transparaître le côté généreux et familial qu’il y a au sein de nos soirées et de notre collectif. Et c’est aussi une façon de remercier les gens qui viennent nous soutenir à nos soirées”, résume l’intéressé.

Boussole Records

Chaque année, à l’aube de l’été, le label sort une compilation des meilleurs morceaux produits durant l’année par ses différents membres. “Mais pas seulement”, tient à souligner Antonin. “Une partie des morceaux provient de producteurs issus du label – François Ier, Mangabey, Joy, Khalk, Kendal, Filiber, FaCIL, entre autres – et l’autre de producteurs susceptibles de signer chez nous un jour, ou correspondant à nos sensibilités musicales.” Une initiative visant les “newcomers”, qui permet d’agrandir le cercle familial et de découvrir de nouveaux talents.

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Pour cette troisième compilation , disponible depuis le 15 juin sur SoundCloud et Bandcamp (et à partir du 1er juillet en physique), la bande d’amis a fait appel “à des producteurs plus orientés house”, comme l’explique Antonin : “Les deux premières étaient très éclectiques et mêlaient plusieurs univers différents, allant de l’électronica à la house en passant par la techno et le nu disco. C’est quelque chose qu’on revendiquait vraiment puisque ça représentait toutes les sensibilités musicales des membres du label. Sur cette troisième compile, on a cherché en revanche à se recentrer autour de notre vision de la musique club, du moins telle qu’on pourrait l’imaginer à nos soirées.”

Tout le crew se dit en tout cas prêt à en découdre le 1er juillet prochain au Bikini à Toulouse, une salle avec laquelle l’équipe de Boussole a su tisser des liens étroits depuis ses débuts. D’ailleurs, Trax vous fait gagner des places ! Ils seront également à Argelès et au Bootleg à Bordeaux les 9 et 16 juillet prochains.

Boussole Records

Pour télécharger la compile, c’est par ici.

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