Pourquoi le premier album de Bicep sur Ninja Tune est l’un des meilleurs disques de la rentrée

Écrit par Mélanie Vitry
Photo de couverture : ©Bicep Tous droits réservés
Le 11.09.2017, à 12h09
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©Bicep Tous droits réservés
Écrit par Mélanie Vitry
Photo de couverture : ©Bicep Tous droits réservés
A l’occasion de la sortie de leur premier album, nous avons rencontré les Irlandais Andrew Ferguson et Matthew McBriar, qui forment à eux deux le duo le plus musclé de la scène électronique actuelle : Bicep. Difficilement classable – et c’est une bonne chose – leur album navigue entre house progressive, trance et garage, passant de notes 80’s rappelant les synthés de John Carpenter à des sonorités bollywoodiennes. Après un an de travail, ils reviennent sur la création de ce premier LP, déjà acclamé par la critique.


Votre album est terminé. Comment vous sentez-vous ?

On est très heureux mais aussi très fatigués ! C’était très long, cet album nous a occupés tous les jours durant un an. C’était un travail avec beaucoup d’expérimentations. Certains tracks étaient faciles à réaliser, d’autres étaient beaucoup plus compliqués, on n’arrêtait pas de les modifier tous les trois jours… C’était parfois épuisant, mais on avait envie de faire des choses différentes de ce qu’on a l’habitude de proposer. Parfois, on se retrouvait juste à faire des sons bizarres dans le studio et au bout de vingt minutes on se disait « Non… ». Quand on a terminé l’album, on a eu l’impression de terminer un master ! On était soulagés et on se disait « On va pouvoir faire la fête ! » (Rires.) Maintenant, on attend le retour des gens. 

Sur cet album, il y a beaucoup moins de tracks pour clubs. Le processus créatif est-il différent d’avant ? Avez-vous plus de liberté avec ce format ?

C’est vrai que c’est plus un album à écouter à la maison. Grâce à ce format, on s’est beaucoup plus concentrés sur les éléments musicaux. Avant, on commençait 90 % de nos tracks avec les percussions. Avec ce format « home listening », il n’y a carrément pas de percussion. Si la mélodie fonctionne d’elle-même, tu peux ajouter n’importe quelle percussion dessus et ça fonctionnera toujours. Pour les live par exemple, on peut lâcher un gros beat techno et ça devrait marcher ! Tu peux vite te perdre à essayer de te concentrer sur les percus, passer ta journée dans le studio à faire des drums… Là, on s’est vraiment concentré sur la musicalité, sur les mesures, on ne voulait pas juste jouer une mélodie classique en La mineur. On a aussi essayé de sélectionner certains éléments du jazz et de les réinterpréter à notre façon. Ça aurait été trop facile de faire un album avec dix club tracks. En plus, en dehors des clubs, on n’écoute quasiment pas de dance music. On écoute énormément d’ambient, d’IDM ou d’expérimental. Avec cet album, on voulait vraiment sortir de notre zone de confort, c’est beaucoup plus excitant ! 

Justement, comment allez-vous adapter ce disque pour la maison en live ?

On a déjà joué pas mal de shows cette année, et à chaque fois, on a repris divers éléments de l’album. Si le track n’est pas vraiment dansant, on utilise des percussions différentes, avec des boîtes à rythme. C’est comme la chanson de l’album, mais avec une vitesse différente. En gros, on remixe les tracks d’une façon beaucoup plus simple, avec seulement les vocals. On isole les éléments forts de la chanson, ceux qui nous semblent mémorables, et on construit le reste autour. Certains tracks de l’album comme « Kites » sont aussi beaucoup plus rapides, plus dansants. On termine parfois les shows avec, et ça rend toujours tout le monde hyper énergique ! 

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On ressent des influences de John Carpenter ou de Bollywood dans cet album également.

Pour John Carpenter, ce n’était pas vraiment une volonté, mais effectivement, il y a énormément de points communs : les synthés analogiques, les gammes mineures… Nous avons fait un mix Halloween pour notre blog il y a environ deux ans, et il y avait énormément de John Carpenter. On adore le disco, la synthpop et on est très inspirés par les synthés et les trucs un peu un peu flippant. En ce qui concerne le côté Bollywood, ce n’était pas vraiment intentionnel de sampler ces mélodies. C’est arrivé un peu comme ça ! Nous avons plein de disques japonais, africains et indiens, et on a trouvé des samples qui allaient bien avec nos titres. On aime vraiment beaucoup de choses… On adore John Carpenter, on adore la musique de Bollywood, on adore Autechre, Steve Reich, nos goûts musicaux sont très éclectiques… Ça se voit sur notre blog d’ailleurs. Un jour, on met en ligne de la drum’n’bass, un autre du hip-hop, des sons des années 80 ou de l’italo-disco… Il y a vraiment des influences de partout. On a essayé de faire une musique un peu hybride, qui se construit à partir d’une tonne de genres différents, qui ne vont pas forcément ensemble ! (Rires.)

Vous avez également des influences qui viennent des années 90 ? Le 2-step, le côté rave… Où étiez-vous à cette époque ?

Matthew McBriar : Je n’étais pas vraiment là-dedans avant 2003/2004, avant de vivre à Londres. Avant, je naviguais entre Belfast et Manchester, et j’écoutais des choses comme Joy Division, New Order ou les Smiths. J’adore la musique de Manchester ! Je suis certainement la seule personne qui aime les Happy Mondays et les Stone Roses (rires). Il y a eu énormément d’influences venant de cette musique anglaise, puis j’ai commencé à m’intéresser à la techno, en même temps qu’Andrew. Mais j’aime vraiment les deux. J’aime la musique énergique, le punk aussi !

Andrew Ferguson : On a commencé à écouter de la hard techno à Belfast. C’était un peu la première musique non-commerciale que tu pouvais entendre là-bas. Tu avais le choix entre des sons un peu kitsch, des tracks de radio ou de la hard techno. À l’époque, on allait souvent dans un club qui s’appelle Shine où il y avait de la musique de rave. En ce qui concerne les influences garage, je pense qu’elles viennent de Londres, où l’on habite aujourd’hui. La 2-step est très UK, le côté grime aussi. 

Vous avez commencé votre aventure avec un simple blog (Feel My Bicep). Aujourd’hui, vous tournez dans le monde entier. Pensiez-vous, à l’époque, en arriver là ?

Le blog était vraiment un moyen pour nous de partager la musique. Quand on a démarré, Discogs n’était pas si populaire, YouTube n’avait pas autant de vidéos… C’était excitant de mettre en ligne des choses qui n’y étaient pas encore ! On ne pensait pas en arriver là. On a fait quelques productions à l’université, mais nous n’étions pas dans la même fac. C’est aussi comme ça qu’on a commencé le blog, on s’envoyait des tracks par Internet. C’était un peu comme faire du DJing, créer des tracklist tous les jours… Puis, petit à petit, c’est devenu plus sérieux, presque une obsession. Aujourd’hui, on tourne à New York, en Chine, c’est fou !



Le duo Bicep sera au Reworks Festival le 13 septembre prochain. Pour toutes les informations, c’est par ici.

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