Par Ines Marionneau
Futuriste, expérimental, apocalyptique, spatial… et bien d’autres mots semblables à ceux que l’on pourrait trouver dans les critiques des films de Kubrick, pourraient qualifier le Horst Art and Music Festival. Logé sur l’ancien Arsenal des Instruments et Appareils de Télécommunication (ASIAT) du ministère de la Défense, le Horst Festival offre au public un terrain de jeu inédit alliant nature et culture. Sur les bâtiments industriels brisés par le temps se glissent le long de leurs murs des lilas violets et des herbes folles. La nature reprend possession de ce terrain laissé à l’abandon et rappelle certains paysages de science-fiction. On se laisse prendre alors au jeu et l’on imagine le récit de la fin d’un monde, d’un monde industriel où se rencontrerait le cosmos.
Quatre scènes égaient cette joyeuse apocalypse dans lequel tout le monde semble prendre beaucoup de plaisir. Ce que l’on pourrait appeler la main stage, « 90*360 », réalisée par l’agence néerlandaise Brandlhuber, prend place dans un traditionnel hangar de festivals de musiques électroniques. Sa particularité : l’immense miroir faisant le tour de la quasi-totalité de la salle et vibrant aux sons des basses frénétiques des nombreux b2b ayant investi les lieux. Mention spéciale aux quatre heures des stars venues d’Angleterre : Call Super et Objekt.

Rencontre du troisième type ensuite avec la scène expérimentale « Ceiling For A Crater ». Abrité par une lourde tente noire, le dancefloor prend la forme d’un véritable cratère réalisé par l’Atelier Tomas Dirrix. Attention, ça glisse. Et particulièrement pour les sets très énervés de Gabber Eleganza, qui pour l’occasion a fait appel à une troupe de danseurs de gabber. La performance des danseurs s’allie parfaitement à la programmation de cette stage. Entre le set de l’enchanteresse sensuelle Céline Gillian, le voyage intergalactique proposé par Ceephax Acid Crew et le pertinent live lunaire de Mattheis, la (re)découverte était au rendez-vous sur le cratère.

La dernière scène ayant particulièrement retenu notre attention fut sans nul doute la scène « The Opposite of Lost ». Si la scénographie proposée était la moins ambitieuse du festival, la stage regroupait un important dispositif de headliners sûrs. D.K, Shanti Celeste, Eris Drew, Upsammy, Deena Abdelwahed, Simo Cell, Gesloten Cirkel et Bambounou se sont enchaînés dans une atmosphère toujours plus folle.
Évidemment, les créations artistiques ne s’arrêtaient pas aux scénographies sous acide qui parsemaient ce terrain semi-industriel, semi-naturel. L’art du « Art and Music » était bien représenté via la multitude d’installations et de performances programmées pour l’occasion. Chacune des bâtisses – qui servaient probablement de bureaux à l’époque de l’ASIAT – est occupée par une installation, plus ou moins bonne, d’œuvres qui questionnent le rapport de l’homme à son environnement mécanique. On pense notamment à Benni Bosetto qui invite le visiteur à enlever ses chaussures et à marcher pieds nus dans un hangar recouvert d’eau et à errer entre des sculptures en terre cuite faites main. Un retour au spirituel appréciable.

Le clou du spectacle reste néanmoins l’installation monumentale de l’artiste Emeka Ogboh, The Way Earthly Things are Going (2017). Située dans l’une des tours de refroidissement du site ASIAT, son installation est constituée d’un ruban infini d’écrans LED qui diffuse en direct des chiffres boursiers du monde entier tandis qu’un chant plaintif remplit cet espace presque vide de la tour.
Si la quasi-totalité du festival est sans reproche, l’on regrettera tout de même un manque de conscience écologique dans cette atmosphère postmoderne. Les canettes de bière, fourchettes en plastique, le grand manque de cendriers et l’absence de toilettes sèches ne sont que des marques de cet ancien monde que le Horst semble vouloir effacer. Il n’empêche que l’on gardera un agréable souvenir de ces deux cosmonautes argentés déposant délicatement, le long des chemins verts des petites boules de lumières. 2020 : L’Odyssée du Horst ?
