Pourquoi Club Late Music est devenu le premier label “open source” de France

Écrit par Tidiane Padra
Le 22.11.2017, à 18h14
04 MIN LI-
RE
Écrit par Tidiane Padra
Aujourd’hui, dire que notre monde se modernise est un euphémisme tant le numérique et ses différents outils prennent de plus en plus d’importance dans nos vies. De l’accès à l’information à l’utilisation quotidienne des réseaux sociaux, en passant par la consommation gourmande de films et de séries, Internet inonde la société. L’impact est visible dans tous les domaines et l’industrie de la musique n’y échappe pas. L’équipe du label Club Late Music creuse le filon et casse les codes du label lambda pour en proposer une nouvelle approche. 

Brice et François se sont rencontrés alors qu’ils étaient étudiants à Metz. Brice suit des études de communication et aide notamment au lancement de l’agence de booking Voulez-vous danser. Pendant ce temps, François est aux Beaux-Arts de Metz puis intègre l’école de photographie d’Arles. Là-bas, il fait la connaissance de Robin qui, tout comme lui, se spécialise dans les arts visuels, et deviendra plus tard la troisième roue du carrosse. Les trois comparses se lancent alors dans l’événementiel et se mettent à gérer l’association OKAY PULSATION pour laquelle ils programment Bambounou, Matthias Zimmerman, ou encore le groupe de rap 1995. Galvanisé par cette expérience, Brice intègre Pias Recordings puis s’envole pour Londres afin de se créer un réseau international.

Conscients de la révolution numérique qui traverse notre époque et ne trouvant pas assez de satisfaction dans le fonctionnement des labels, ils décident de prendre les choses en main. En avril 2015, ils montent leur propre entreprise sous le nom de Club Late Music. Leur projet se présente comme une alternative aux ténors de l’industrie, et invite qui le veut à venir poser sa pierre à l’édifice dans une optique collaborative.

Quand et comment le projet a-t-il pris de l’ampleur ?

Au tout début, nous avons réuni quelques artistes : des DJ’s du Japon, de Londres, de Los Angeles, de France et nous avons sorti une première compilation pour officialiser le lancement du label Club Late Music. 

C’était début juillet 2015. Ça a pris tout de suite, sans promotion. Nous avons été invités à jouer au Chester à Berlin deux semaines après aux côtés de MobileGirl et Last Japan. S’en suivit une soirée en novembre 2015 à Londres avec seulement les membres de l’époque de Club Late Music. La soirée a été un tel succès que nous avons été ensuite invités par l’un de nos artistes à Tokyo. C’est alors qu’en avril 2017, nous avons commencé à travailler sur le lancement de ce projet « GUN », pour Global URL Nation. L’idée était de réunir des DJ’s, artistes, compositeurs du monde entier, qui ne se connaissaient pas forcément mais qui venaient tous de ce village Internet. L’idée était de créer une communauté de talents, de jeunes pousses et d’anciens, autour d’un même projet, autour d’une même plateforme, pour bosser sur des projets innovants, nouveaux et différents qui garderont comme fil rouge cette idée de la culture en ligne et de la club music. GUN est donc une communauté qui est gérée par Club Late Music, le vaisseau amiral composé de François, Robin et moi. Lorsque nous jouons tous ensemble, nous prenons le nom de CLM HQ.

Quelles sont vos inspirations ?

Nous apprécions beaucoup les nouveaux collectifs de la culture URL qui se créent ici et partout en Europe et dans le monde. Nous regardons tous les jours ce qu’ils se passent autour de nous, nous discutons avec beaucoup d’entre eux, voir ce qu’il est possible de faire ensemble. On se donne des conseils. On s’inspire du partage et de l’échange avec les autres. 

Qu’entendez-vous par culture URL ?

Par culture URL, nous entendons tout ce phénomène qui a émergé d’Internet. Depuis les années 2000, notre usage d’Internet, des outils de communication – que ce soient mobiles ou électroménagers –, a permis de créer de nouvelles formes d’échange social via les communautés, les réseaux sociaux, la réalité augmentée, les applications mobiles, les forums, le social gaming. La culture URL a participé au métissage sonore actuel, a permis de créer des communautés mais aussi, via les nouvelles technologies, de créer de nouvelles expériences d’écoute et d’usage de la musique.

Selon vous, la révolution numérique a-t-elle permis plus de rapidité dans la construction de vos projets ?

Totalement. Par exemple, sans vouloir faire la publicité de l’un ou de l’autre, l’un des quatre groupes d’artistes du projet d’EP Cadavre Exquis a travaillé sur Slice, une plateforme cloud pour la création musicale. Après, pour les autres groupes, nous avons pu récupérer très rapidement les fichiers grâce aux plateformes de transfert. Enfin, toute la coordination finale s’est faite rapidement grâce aux réseaux sociaux, donc oui, sans ça, ça aurait été bien différent.

Internet vous aide-il pour toucher un public à l’international ?

Club Late Music est encore assez jeune. Nous avons seulement deux ans et le projet communautaire GUN a seulement quelques mois. Dernièrement, les choses ont assez bien basculé pour nous. Il est vrai que nous essayons d’avoir une attitude assez tentaculaire à travers nos projets mais aussi à travers notre communication. C’est pourquoi nous nous sommes davantage connectés avec des gens à l’international. Nous avons été incroyablement surpris de l’accueil reçu lors de notre soirée à Amsterdam en septembre. C’était un coup un peu fou pour nous, mais ça s’est très bien transformé. La scène locale qui nous suit est venue nous encourager, c’était une belle surprise. Après, nous gardons à l’esprit que ce n’est pas toujours aussi simple et qu’il faut toujours se donner à fond.

Aujourd’hui, de nombreux collectifs assez similaires se développent : comment faire face à la concurrence ?

Il faut avoir une vision concrète de ce que tu veux et créer de l’énergie avec ceux qui te suivent ou viennent à tes soirées. 

Vous comparez votre projet à un logiciel open source, qu’entendez-vous par là ? 

On essaie de drainer une vaste communauté d’individus ne se connaissant pas forcément, venant de tous horizons, mais motivés par le même projet artistique. Chacun peut apporter sa pierre à l’édifice.


Le trio a récemment créé sa propre communauté artistique en ligne  nommée G.U.N (Global Unit Nation), par l’intermédiaire d’un simple formulaire d’inscription sur leur site. Récoltant une centaine d’inscriptions, ils sortent en avril dernier un EP de trois titres. En forme de cadavre exquis collaboratif, il est enregistré par trois groupes différents composés de quatre artistes chacun. Chaque groupe a composé une partie de chaque titre, d’où le nom d’Exquisite Corpse. Un EP hybride réussi dans lequel on retrouve de multiples influences, de la techno à la scène UK garage. Club Late Music a déjà de la suite dans les idées comme la sortie d’une double compilation et d’un nouvel EP, qui, nous disent-ils, sera encore plus particulier. La machine est lancée.

Newsletter

Les actus à ne pas manquer toutes les semaines dans votre boîte mail

article suivant