C’est une première en France. En mai prochain, la Gaîté Lyrique accueillera certains des plus grands artistes de l’électronique japonaise à l’occasion du festival Japan Connection, organisé par Make It Deep. Non content de bénéficier de premières mondiales pour certains artistes, le festival est parrainé par Hugo LX, producteur d’une house sensible repéré par Chez Damier en 2016, et Kuniyuki Takahashi, vétéran de la scène électronique et touche-à-tout aux multiples patronymes — il est aussi Forth, Frr Hive et Koss, alias sous lesquels il produit aussi bien du downtempo que de la drum’n’bass.
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Le programme est « composé de trois ou quatre générations de musiciens et DJ’s », annonce LX. Jeudi 9 mai, le DJ ouvrira lui même les hostilités, avant de laisser place à son collègue Kuniyuki Takahashi pour un live en trio, avec Soichi Terada, dont la deep house lunaire coexistera avec les productions très inspirées hip-hop de Sauce81. Le lendemain, le duo synthpop Dip In The Pool se produira en concert, suivi de Satoshi Tomiie, pionnier de la house à la japonaise et véritable exportateur du genre. Enfin, Kuniyuki sera de retour en live le 11 mai, cette fois entouré de Joe Claussel et ses mix énergiques, mais aussi de Fumio Itabashi, prince du jazz nippon.
Un line-up plein d’exclusivités, qui permettra de faire découvrir un héritage encore méconnu des Français. Pour l’occasion, les deux parrains de l’évènement ont accepté de répondre aux questions de Trax.
Qu’est ce qui vous a séduit dans ce projet ? Un festival français entièrement dédié à la musique japonaise, ça a du sens pour vous ?
Hugo LX : La fascination des Français pour le Japon est parfois très sélective et unidimensionnelle. Il faut dire que le pays se prête parfois bien à ces clichés de carte postale, traditionnels et ultramodernes. Il existe pourtant autant de Japon qu’il y a de Japonais. La richesse musicale de ce pays est le fruit d’un mélange d’influences très variées, qu’elles soient personnelles, régionales, nationales, ou simplement historiques, comme ce culte que les Japonais vouent à la culture américaine. La dance music a cristallisé depuis les années 80, ce moment de “friction” de culture intense dans l’archipel. Nous avons ici, à travers notre programmation, l’occasion avec Kuniyuki Takahashi de refléter le plus justement possible cet héritage encore assez méconnu.
Kuniyuki Takahashi : En tant que Japonais, je trouve la relation entre la musique japonaise et le reste du monde fascinante. En cela, Japan Connection est un festival particulièrement intéressant car il donne l’occasion à des artistes comme moi de collaborer et expérimenter de manière très naturelle. Et c’est peut-être une de ses plus grandes réussites.
En quoi la programmation du festival représente-t-elle la richesse de la scène japonaise ? Quelle partie vous parle le plus, personnellement ?
LX : Nous avons dans notre programmation pas moins de trois ou quatre générations de musiciens et DJ’s. Il y a des précurseurs, comme le duo Dip In The Pool, qui a très tôt développé une esthétique électronique raffinée et novatrice dans le paysage musical japonais, ou le pianiste Fumio Itabashi, dans un registre plus proche du jazz spirituel. On trouve aussi les pionniers de la house, de la techno ou du nu-jazz comme Satoshi Tomiie ou Toshio Matsuura, qui ont contribué à faire grandir le genre dans l’archipel, et ont fait sortir la scène locale hors de ses frontières, aux Etats-Unis et en Europe. Nous avons également mis à l’honneur des artistes contemporains comme Sauce81, qui ont su redonner un nouveau souffle à la dance avec un héritage hip-hop et soul très affirmé.
Takahashi : Je suis très fier qu’Itabashi soit présent. Ainsi que d’autres artistes, qui sont connus pour avoir créé une musique dite “unique” dans les années 80, ou pour avoir façonné la culture club du Japon. Avec les groupes qui ne sont pas d’origine japonaise, cette programmation a la capacité de traduire la diversité de la musique nippone.
Quel est l’artiste ou le projet que vous êtes particulièrement fiers de voir figurer à l’affiche ?
Takahashi : Sincèrement, je trouve que tous les invités font un travail merveilleux dans leur style. J’ai énormément d’admiration et de fierté envers eux.
LX : De mon côté, il y a vraiment quelques coups de cœur. Je ne peux pas trop en dire, mais je suis ravi que nous ayons pu convier deux artistes que j’affectionne particulièrement : une DJ de Kyoto, dont certains ont peut être déjà pu écouter les sets très jazzy, et un producteur et instrumentaliste que j’ai découvert lorsqu’il séjournait en France, il y a trois ans, dont le style très organique et aérien fait le lien entre la house américaine et la musique japonaise avec beaucoup de subtilité.
Où voyez-vous la scène japonaise de demain ?
Takahashi : Des artistes, qui travaillent généralement en solitaire, vont monter sur scène et expérimenter ensemble en live au cours du festival. Je pense que ce genre de projet, encore trop rare, est ce qui fait avancer la scène. J’aimerais vraiment que ça devienne l’ADN de la scène musicale japonaise.
LX : C’est une question un peu compliquée, tant le renouvellement générationnel est fragile au Japon, en particulier au niveau culturel, mais j’ai bon espoir que ce regain d’attention envers la dance music des débuts inspirera les jeunes producteurs et DJ’s à développer un genre dont l’esprit se retranscrira à travers la musique : ouvert, chaleureux et en phase avec son temps !
Toutes les informations sont à retrouver sur la page Facebook de l’évènement.