Avec Night Fever : 100 hits qui ont fait le disco, son nouveau livre à paraître aux éditions Le Mot et le Reste le 9 juin prochain, le musicien professionnel, conférencier et chroniqueur Belkacem Meziane plonge le lecteur dans les origines et l’âge d’or de ce courant musical initiateur de la dance music. Avec comme point de départ l’année 1974, l’ouvrage retrace l’histoire des communautés gay, noire et latine de New-York, et leur mélange sur des dancefloors à boules à facettes, dans ces nouveaux lieux appelés “discothèques”.
Sous l’emprise de célèbres DJs, le Loft, le Continental Baths, ou la Gallery assistent en leurs murs à l’explosion du disco, genre musical qui changera irrémédiablement le cours de l’histoire de la musique. Des artistes aux producteurs, en passant par les pochettes et les BPM, les 250 pages du livre naviguent dans l’histoire au gré de 100 hits qui ont jalonné ce mouvement musical, et les revendications de minorités exprimées sur la piste de danse.

Quels sont vos liens avec la musique disco ?
Premièrement, j’ai grandi dans des banlieues où l’on écoutait du funk, de la soul et pas mal de disco. Que ce soit Barry White, Donna Summer, Chic, leurs musiques étaient très présentes dès mon plus jeune âge. Étant le petit dernier de la famille, j’ai “subi” la musique des grands frères. Aux débuts des années 80, lorsque j’ai commencé à être conscient de cette musique, il y avait encore du disco à la télé et sur les radios libres. En tant que musicien saxophoniste, je joue aussi dans pas mal de groupes où l’on fait du funk et du disco. Et puis cela fait maintenant 14 ans que je suis conférencier, j’ai donc beaucoup étudié cette musique.
C’est ma conférence sur le disco, que j’ai appelé “Night Fever”, qui était la plus demandée, c’est une musique très populaire. Je l’ai donnée dans des médiathèques et des écoles de musique de plusieurs villes de France, en faisant son lien avec toutes les musiques noires, et par un autre biais que par les hits. Une manière de sortir le disco de ce qu’on a l’habitude de dire ou lire.
Pourquoi avoir choisi de faire un top 100 des hits pour retracer l’histoire de ce courant musical ?
Cela fait partie d’une discussion avec l’éditeur, faisant notamment suite au premier livre que j’ai sorti chez Le Mot et le Reste sur le funk (On the One!, ndlr) réalisé autour d’albums. Pour le disco, c’était plus pertinent de prendre des hits que des albums, car cette musique se réfléchit plus en termes de singles et de maxis. Par le biais de ces hits, c’était aussi le moyen de parler aussi de l’impact commercial et médiatique de chaque morceau. Il y a des artistes que l’on connaît pour des hits, alors qu’ils ont une dizaine d’albums inconnus… Les gens ignorent souvent le reste de la discographie de Chic par exemple.
Les producteurs sont les artisans du disco, ils ont eu un impact énorme sur cette musique.
Belkacem Meziane
Comme avez-vous sélectionné ces 100 hits ?
J’ai voulu réaliser une vue globale chronologique. Ce ne sont pas les 100 meilleurs hits du disco, hors de question, ce n’est pas possible ! L’idée a été de sortir de cela, pour parler un petit peu de tout. J’ai voulu créer un panorama des musiques héritières de ce mouvement musical, notamment en sélectionnant un seul morceau par artiste, ce qui a pu être difficile pour certains artistes comme Donna Summer ou Gloria Gaynor. Jusqu’à passer par la house, la dance des années 90, ou des artistes comme DJ Cassidy et les Daft Punk plus récemment, qui continuent de véhiculer l’essence de cette musique.
Le livre évoque aussi des producteurs, souvent moins connus que les interprètes, comme Rinder & Lewis. L’objectif était d’englober un certain nombre d’aspects pour mieux comprendre le disco comme un ensemble, et ne pas seulement citer le sommet de l’iceberg via ses “stars”. J’ai aussi traité des origines du mouvement, à travers des titres qui ne sont pas forcément du disco, comme ceux de Manu Dibango, mais qui expliquent comment le phénomène disco s’est mis en route dans les discothèques à une époque où il n’existait pas encore. Je me suis documenté par de nombreuses lectures croisées et précises sur le disco, de documentaires, mais aussi surtout d’interviews de DJs, qui sont une source incroyable.

Raconter des hits, c’est aussi raconter de belles histoires.
Belkacem Meziane
Votre travail d’archives est conséquent, avec des fiches descriptives de chaque hit. Comment avez-vous procédé ?
Pour les pochettes, j’ai été aidé par Hélène et Aliénor qui travaillent à la maison d’édition Le Mot et le Reste. Pour chaque chronique, il a été important de mentionner l’auteur, le label et les BPM, les éléments-clés pour acheter des disques. Préciser dans quel cadre ces hits ont été réalisés permet aussi de montrer l’impact qu’ont eu les équipes de producteurs, comme les gens de la Philadelphia Soul, Norman Harris ou une fois de plus Rinder & Lewis. Ce sont les artisans du disco, ils ont eu un impact énorme sur cette musique. J’ai l’ambition de vouloir “éduquer” les gens, avec de gros guillemets, de leur proposer une autre manière d’écouter la musique.
Et concernant les BPM ?
Le disco est une musique très formatée autour des 120 BPM. Au début, le rythme était contenu entre 90 et 110 BPM, puis petit à petit il est allé vers 120, et aujourd’hui on arrive parfois aux 130. Pour un DJ, cette information-là lui parle tout de suite, car il travaille les BPM pour réaliser ses mix. Le BPM est un peu la carte d’identité du morceau. Il était enfin essentiel d’ajouter les anecdotes liées aux différents morceaux, pour égayer un peu la lecture et s’éloigner d’un aspect trop sérieux. Car raconter des hits, c’est aussi raconter de belles histoires.