Après avoir donné ses lettres de noblesse aux mix digital, Richie Hawtin crée la surprise avec une table de mixage analogique, qui risque de remettre en question pas mal de standards actuels. Conçu avec l’ingénieur Andy Rigby-Jones, le Model 1 remet la créativité au centre du DJing. Et ça ne pourrait être que le début de l’aventure PLAYdifferently. Depuis son arrivée à Berlin au début des années 00, Richie Hawtin n’a cessé d’œuvrer pour l’émergence et la démocratisation du mix digital (de Final Scratch, le premier système permettant de jouer des vinyles time codés, jusqu’à Beatport, la première plateforme MP3 pour DJ’s). Il a permis l’instauration de nouveaux standards via son utilisation innovante de logiciels comme Traktor (boucles, effets…) et le développement de contrôleurs, en collaboration avec Allen & Heath (CTRL:62 et CTRL:92). Mais il a également passé des années à tester différentes tables de mix, avant de rencontrer l’Anglais Andy Rigby-Jones, justement ingénieur et développeur chez Allen & Heath.
En 2010, c’est lui qui imagine la Xone:DB4, première table digitale dédiée aux mix sur Traktor et équipée d’une carte son. Séduit, Richie Hawtin va finir par s’investir, avec Andy, dans le développement de la série Xone, jusqu’à la Xone:92 (celle qu’il aura le plus utilisée). Mais aujourd’hui, et alors que le mix digital est devenu une véritable institution, le DJ canadien veut passer à autre chose. « Dans les années 90, quand je faisais la série Decks FX, j’incorporais des technologies que tu retrouves aujourd’hui sur toutes les tables. Je pense que le confort a fini par remplacer la créativité. Les outils sont géniaux, mais tout le monde a les mêmes et les utilise de la même façon. Il était temps de remettre la créativité au centre du processus », explique-t-il.
Priorité à la qualité du son
En 2014 et après 25 ans de collaboration, Andy quitte Allen & Heath pour rejoindre l’aventure PLAYdifferently, mais celle-ci conserve l’appui et le savoir-faire de la marque anglaise via Audiotronix, son propriétaire. Pendant plusieurs mois, les deux ambassadeurs de la série Xone vont imaginer comment tourner une nouvelle page dans l’histoire du mix. « Nous avions envie de créer une table différente de toutes les autres, en se basant sur mon expérience et celle d’autres DJ’s », rappelle Richie.
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Et, contrairement à ce que l’on pouvait attendre, le résultat n’est ni digital, ni hybride, mais bien 100 % analogique. « Notre priorité, c’était la qualité du son. Là, est elle optimale. Une platine vinyle, CD, un ordinateur ou un synthétiseur, tous bénéficient du même traitement », rappelle-t-il. En outre, une fonction « overdrive » permet d’apporter de la chaleur via une légère distorsion harmonique. « C’est très créatif, mais ça peut aussi être utile pour jouer de vieux disques ou des démos composées le jour même. »
La promesse d’un mix non figé
Vient suite le mix lui-même et c’est là que le Model 1 change la donne. Exit le traditionnel crossfader, devenu inutile grâce à l’extrême fluidité des boutons rotatifs. Deux filtres permettent de couper les basses et les aigus (contrairement aux autre tables, il n’est pas possible de booster les fréquences). Et pour l’equalisation pure et dure, un seul EQ ! Unique mais révolutionnaire. Car, au lieu de jouer avec les basses, les médiums et les aigus, le Model 1 vous propose de choisir la fréquence à partir de laquelle vous désirez filtrer (sur 7 octaves). Idéale pour couper un son de grosse caisse, tout en laissant de l’espace à la ligne de basse, par exemple. Cette innovation, c’est la promesse d’un mix non figé, puisque les fréquences intéressantes à moduler varient selon les tracks.
Pour un mix, disons plus classique, le Model 1 embarque un EQ à 3 bandes sur le master et un bouton switch pour appliquer rapidement l’equalisation d’une piste sur le master. Si on tient compte du fait qu’il est possible de mélanger l’EQ du master avec celles des pistes, de rajouter l’autodrive et des effets externes (brancher une réverbe par exemple), les possibilités paraissent infinies (au point que le Model 1 trouvera sa place dans les studios).
« Les DJ’s ne sauront pas pourquoi nous avons choisi telle ou telle fonction, pris telle ou telle décision. En revanche, ce qui va être intéressant, c’est de voir comment ils vont se les approprier. Le Model 1 est un outil très intuitif et il faut un certain temps avant de savoir ce qui est bon pour soi. » Lorsque les premières rumeurs sur le Model 1 sont apparues, beaucoup ont pensé qu’il ne s’agirait que d’une énième table de mixage, estampillée Hawtin. Il n’en est rien. La collaboration entre Richie Hawtin et Andy Rigby-Jones rappelle celle entre Dave Smith et Tom Oberheim. Leur travail pourrait réellement apporter un vent nouveau dans l’industrie sclérosée du DJing. Et il y a fort à parier que les deux sorciers ont déjà quelques idées en tête pour la suite.

Outre ses caractéristiques classiques (6 canaux, 2 pré-amplis phono, 2 envois et 2 retours stéréo, etc.) et ses fonctionnalités innovantes (overdrive analogique, filtres résonnants, Sculpt EQ), le Model 1 intègre deux sorties casques séparées. Cela signifie qu’un second DJ peut écouter une piste au casque, sans gêner le premier. Génial pour les sessions back-2-back, mais aussi pour le passage de relais entre DJ’s.
Tarif: environ 3 000€.
Pour obtenir les caractéristiques techniques des machines disponibles, rendez-vous sur stars-music.fr.