Mirage Festival : un évènement retransmis en “techno-vision”

Écrit par Trax Magazine
Le 11.03.2016, à 12h31
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Écrit par Trax Magazine
Quatre ans déjà que Dolus & Dolus, l’association à l’origine du Mirage Festival, invite les Lyonnais à découvrir les formes artistiques émergentes, liées de près ou de loin aux mutations engendrées par les technologies numériques. Trax a eu la chance de couvrir une semaine durant cette édition 2016 particulièrement affûtée, autour du thème “techno-fiction”, et qui brassait performances, workshops, rencontres pros et débats publics, expositions et soirées. Reportage dans dans la Ville des lumières qui mérite plus que jamais son label de “creative city”.

Par Maxence Grugier (merci à Nicolas Rémy pour ClekClekBoom)


Crédit Photo : © Elena Volterrani

Belle édition que ce quatrième Mirage Festival de Lyon qui se déroulait dans les lieux emblématiques de la capitale des Gaules du 2 au 6 mars derniers. L’évènement, traitant des arts numériques au sens large, offrait une sélection d’œuvres innovantes d’envergure, savamment pensées et dont la lisibilité n’était pas forcément immédiate, à cause de sa subtilité justement (à ce titre, on salue l’effort de vulgarisation réalisé par l’équipe de Dolus & Dolus).

Autour du thème “techno-fiction”, la manifestation débordait largement du cadre des “arts numériques classiques”, en s’intéressant à d’autres enjeux. En effet, à l’heure où le mot “innovation” est utilisé à toutes les sauces, on oublie souvent qu’il ne concerne pas uniquement les applications, casques de réalité virtuelle, tablettes et autres gadgets plus ou moins quotidiens et marqués du sceau d’un futurisme déjà ringard.

Le Mirage Festival faisait l’effort d’aborder d’autres formes de création, saisissantes et innovantes, mais aussi poétiques et rafraîchissantes, dans un univers de plus en plus technophile. Il s’agissait donc bien de proposer une nouvelle “techno-vision”, c’est-à-dire une alternative à nos univers calibrés, en se réconciliant avec l’histoire des technologies et le réel.


Crédit Photo : © Elena Volterrani

Retour au réel

Une édition en partie placée sous le signe de la low-tech donc, de la réappropriation de la technologie et du réenchantement du quotidien, pour une (techno) fiction pas forcément tournée vers le high-tech et la surenchère. Cette année au Mirage Festival, pas de démesure d’images 3D, d’art génératif et de machines rutilantes, mais des interventions originales, qui, pour beaucoup, détournaient l’usage que nous faisons de nos outils technologiques, ou inventaient – souvent avec humour – de nouvelles formes de création.

On pense aux géniales petites machines (faussement) obsolètes du russe VTOL (I/O, par exemple, la machine à écrire qui réalise le portrait du spectateur en code ASCII) présentée pendant cinq jours à la Galerie des Terreaux, ou à Planet of Crossing, la machine (entièrement mécanique) à graver des formes algorithmiques de la Hollandaise Nibiru, ou la 65° – 75° du Français Bertrand Lanthiez qui reproduisait les aurores boréales aperçues durant son périple dans le Grand Nord à partir de voilage, de bois (et d’un MacBook, tout de même !). 


Crédit Photo : © Elena Volterrani

Des pratiques numériques en résonance avec le quotidien

Côté performances, idem : un attrait marqué pour l’environnement et son impact sur notre existence (avec les spectaculaires Afterschock et Seismik du Canadien Herman Kolgen, où les soubresauts tectoniques de la planète étaient mis à profit en direct), un retour au mysticisme avec The Mirror and the Mask, la séance de live cinéma vaudou de l’Américain Pierce Warnecke et de l’Israélien Yair Glotman, à base de statuettes et d’objets imprimés en 3D, et enfin, une belle façon de se réconcilier avec notre corps pendant la performance de la Québécoise Myriam Bleau et ses stupéfiantes toupies musicales accouchant d’une forme de hip-hop hybride et délicieusement sensuel. Une artiste qui, comme beaucoup d’autres au cours de ce festival, a laissé le public s’approcher et questionner sa démarche. Well done !

De son côté, le Français Nicolas Maigret interrogeait avec humour notre utilisation quotidienne des réseaux en présentant une courte histoire du P2P, entre performance et conférence. C’était The Pirate Cinema, un exercice à la fois politique et artistique, participant d’une archéologie des médias salvatrice.


Crédit Photo : © Elena Volterrani

Mirage Club, entre électronique classique et nouvelle garde 

Le Mirage faisait la part belle à l’art de la “bécane” (les ordinateurs), qui s’illustrait aussi dans le plateau électro du vendredi soir, tenu de main de maître par les pionniers néerlandais du label Viewlexx, I-F, Delta Funktion et Intergalactic Gary, en une série de DJ sets carrément “retour vers le futur”, très marqués 80’s (cosmic et italo-disco, new wave,,minimal wave, bleep, acid house, EBM…) accompagné d’une pointe de mélancolie, dark wave et cold wave typiques de l’époque, même dans les moments les plus hédonistes proposés par Gary. Une très bonne nuit pour se mettre en jambes.

Le samedi était dédié aux nouvelles graines du label ClekClekBoom, qui ont su monter un plateau cohérent en puisant dans toutes les sources de la musique électronique avec Aleqs Notal, NSDOS et Coni. Si Aleqs Notal a joué un warm-up house / disco agréable, c’est réellement NSDOS (alias Kirikoo Dès) dont le live électronica / minimal / dancefloor a remporté la palme, malgré une transition un peu brutale. On notera la belle présence de cet artiste parisien qui a visiblement pris plaisir à construire et déconstruire ces boucles. Le dimanche, la soirée de clôture était assurée par Aïsha Devi (alias Kate Wax), grande prêtresse des musiques électroniques genevoise, fondatrice de Mental Groove et collaboratrice de Border Community, actuellement à la tête de son nouveau label, Danse Noire, pour un live audiovisuel bluffant et jusqu’alors inédit en France. 


Crédit Photo : © Elena Volterrani

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