À voir : l’essence de la trap music des quartiers d’Atlanta capturée par Vincent Desailly

Écrit par Simon Clair
Photo de couverture : ©Vincent Desailly
Le 16.11.2021, à 15h28
03 MIN LI-
RE
©Vincent Desailly
Écrit par Simon Clair
Photo de couverture : ©Vincent Desailly
0 Partages
Pour son premier livre The Trap, le photographe français Vincent Desailly est allé explorer les quartiers d’Atlanta où résonnent à plein volume les basses puissantes de la trap music. Il en a ramené des images brutes et poétiques, fruit d’un regard différent posé sur la capitale de l’état de Géorgie.

« Le Sud a quelque chose à dire ». C’était en 1995 et personne n’a oublié la formule. Pour certains, elle aurait même mérité d’être érigée en hymne national. Ce soir-là, en pleine cérémonie des Source Awards, la tension entre East Coast et West Coast est à son apogée, portée par la rivalité meurtrière entre les labels Death Row et Bad Boy records. Au milieu des insultes et des menaces que s’envoient par discours interposés les gros calibres du rap de New York et de Los Angeles, c’est un jeune duo d’Atlanta nommé Outkast qui vient chercher son prix de meilleur nouveau groupe de rap, sous les huées du public présent dans la salle. Pas de quoi faire peur à André 3000 qui profite du moment pour rappeler de cette formule choc qu’on rappe aussi dans le Sud des États-Unis.

©Vincent Desailly

Vingt-cinq ans après cet épisode désormais célèbre, force est de reconnaitre qu’Outkast avait vu juste. Car Atlanta est devenu non seulement la capitale mondiale du hip-hop mais aussi l’épicentre du mouvement trap qui influence la pop aux quatre coins du monde. Pourtant, la ville n’a pas été fondamentalement transformée pour autant. Dans les quartiers Sud et Est d’où sont originaires la plupart des rappeurs locaux, la vie suit son cours loin des clichés gangster souvent associés à la trap. C’est à cette réalité que le photographe français Vincent Desailly a décidé d’aller se confronter afin de raconter avec une délicatesse rare le quotidien de ceux qui gravitent autour de cette musique. « Atlanta est un environnement assez paradoxal. Il y a là-bas la moiteur du Sud des États-Unis et une végétation très développée qu’on ne retrouve pas dans d’autres grandes villes américaines. Comme la densité de population est assez faible et que les quartiers sont géographiquement très éparpillés, il faut beaucoup rouler en voiture, dans des décors qui ressemblent parfois à des paysages de campagne. Il y a donc quelque chose d’assez doux, qui tranche avec la pauvreté et le manque de moyens de certains quartiers », explique le photographe qui a voulu mettre en avant ces contrastes dans un livre de photos baptisé The Trap et publié en 2019 aux éditions Hatje Cantz.

01
©Vincent Desailly
©Vincent Desailly

Pour cette série, Vincent Desailly s’est donc rendu à plusieurs reprises à Atlanta, profitant parfois des contacts de son ami Brodinski pour rencontrer sur place et photographier des danseuses anonymes, des gamins des rues ou des rappeurs célèbres. « Les leaders du genre, que ce soit Migos ou Gucci Mane, vivent toujours à Atlanta. C’est aussi ce qui donne à la ville une énergie qui fait que cette scène reste en vie et se porte bien. Mais pour le livre, j’ai préféré ne pas légender les images afin d’anonymiser les personnes photographiées. Tout le monde est donc au même niveau, que ce soit le rappeur, le manager, le voisin, le frère, etc. Je voulais traiter de tous ces gens liés à la trap sans nécessairement traiter de la musique frontalement. » C’est ce qui explique aussi la dimension presque onirique qui se dégage parfois de ces photos. Plutôt que de verser dans le misérabilisme, The Trap préfère s’attarder sur des atmosphères apaisées ou des lumières douces qui donnent un relief nouveau à ce monde du rap d’Atlanta que l’on pensait pourtant connaître par coeur. Un autre regard sur la trap, moins racoleur et sûrement plus juste.

©Vincent Desailly
01
©Vincent Desailly
0 Partages

Newsletter

Les actus à ne pas manquer toutes les semaines dans votre boîte mail

article suivant