Par Riwan Marhic
Du Berghain, on ne peut pas ramener de photos, mais on peut ramener des odeurs. C’est ce à quoi s’est attelée l’artiste Isabel Lewis. Dans ses “Occasions”, des performances artistiques qu’elle a déjà organisées au Palais de Tokyo et au Tate de Londres, elle met à profit les cinq sens de son public. Après avoir tenté de reproduire l’odeur de l’intelligence, la Berlinoise a décidé de reproduire l’ambiance olfactive du club techno de Friedrichshain pour l’une de ses créations sur la “bodily culture”, que l’on pourrait traduire par “culture du corps”.
Afin de réaliser ses expériences, elle s’est associée à chimiste touche-à-tout Sissel Tolaas. La Norvégienne, qui synthétise des odeurs depuis les années 1990, a su séduire autant le MoMA de New York que Louis Vuitton ou Ikea par ses créations odorantes. Pour cette nouvelle oeuvre, les artistes ont jeté leur dévolu sur l’ancienne centrale électrique de Berlin où les danseurs transpirent sur les rythmes des résidents Ben Klock ou Marcel Dettmann.
« Je m’y suis rendue avec la ferme intention de ne pas boire d’alcool, confie Lewis. Il fallait que je sois apte à sentir les choses. Et croyez-le ou non, j’ai passé la meilleure soirée de ma vie au Berghain ce soir-là. J’ai pu aspirer l’air de 30 ans de soirée, de fumée de cigarettes, d’alcool renversé au sol, senti l’odeur des milliers de corps transpirants, de la laque et du parfum bon marché. C’est l’odeur des phéromones. »
Résultat, un mélange entêtant qui a été diffusé pendant une “Occasion” l’été dernier. Agréable pour les uns, dégoûtant pour les autres, le produit n’est pas destiné à être mis en vente. Il aurait pourtant sa place au rayon des objets farfelus qui profitent du culte autour du Berghain pour faire leur beurre.