Kosh jouera aux côtés de LB AKA Labat, Splitzer et Tarmac3000 le 25 janvier prochain à L’astrolabe à Orléans dans le cadre de la soirée Club Trax x Fusion Estivale. Plus d’infos sur le lien de l’événement.
Qui sont les habitants du monde sous-marin imaginé par Drexciya ? Dans la jaquette de sa compilation The Quest (1997), le duo electro originaire de Detroit détaille l’origine des personnages mythologiques qui peuplent les tribus drexciyennes. Dans des temps reculés, les commandants d’un navire transportant des esclaves d’Afrique jusqu’en Amérique jetèrent par-dessus bord les femmes enceintes qui ralentissaient l’embarcation. Plongées dans l’océan, elles donnèrent naissance à des enfants munis de branchies. Répartis en différentes tribus, leurs descendants peuplèrent le monde aquatique de Drexciya. « La cohérence de cet univers me fascine », confie Youssef Benjelloun, plus connu sous l’alias Kosh. « Je me souviens précisément du morceau qui a déclenché mon intérêt pour Drexciya. C’était, “Aqua Worm Hole” (1993). Je l’ai entendu pour la première fois en 2013 et j’ai été captivé par cet univers mais surtout par la musique. Je n’avais jamais entendu de tels arrangements. Les structures des morceaux étaient totalement nouvelles pour moi. »
À 29 ans, Kosh pourrait tout à fait être le chef d’une tribu drexciyenne, à ceci près que ses influences ne se limitent pas au mystérieux duo des Grands Lacs. Quatre EP produits en deux ans inscrivent le jeune producteur dans le giron des écoles de Detroit, Chicago et de la house du New Jersey. Musicien depuis l’âge de 12 ans, d’abord fan de hard rock et de metal, Youssef Benjelloun installe Fruity Loops sur son ordinateur alors qu’il est encore lycéen. « Je n’avais pas toujours de groupe avec qui répéter ou composer », se souvient Kosh. « J’avais donc installé le logiciel pour produire une rythmique me permettant de jouer du rock. Plus tard je me suis mis à explorer le logiciel ».
Techno vs Médecine
Les premiers disques de musique électroniques que Youssef écoute se rapprochent de la psy trance et du hardcore. « J’étais encore très proche de l’univers rock et j’étais attiré par des styles très radicaux », explique-t-il. Le musicien s’ouvre progressivement à d’autres horizons. « Je me souviens d’un set de Sven Vath sorti en 2007 et qui a beaucoup joué dans mon éducation musicale. Le mix a marqué le début de ma transition musicale vers la techno ».
La même année, en solitaire, Youssef Benjelloun commence à produire de la musique électronique, une passion qui allait ruiner ses études de médecine. « Je me suis inscrit à la fac de médecine à Bruxelles. Au lieu d’aller en cours, je restais dans ma chambre et je produisais. Je ne suis donc jamais devenu docteur ! », ironise-t-il. De 2012 à 2016, Youssef étudie aux États-Unis. Quatre années qui vont définir plus précisément le style du producteur. « J’étudiais à Orlando (en Floride, ndlr) mais j’ai voyagé dans le pays, notamment à New York. C’est là que j’ai commencé à trainer chez les disquaires. J’ai rencontré beaucoup de monde et je me suis intéressé à la house du New Jersey, à l’histoire de la dance music américaine. »
Retour à la Casa
Revenu des États-Unis, Kosh ne s’installe pas directement dans l’Atlantide drexciyenne. Il retourne vivre chez ses parents à Bouskoura, petite ville à 20 km au sud de Casablanca. « Je vais déménager dans le centre de Casa au cours des prochaines semaines, ici c’est un peu calme », prévoit-il. Dans la capitale économique du pays, la contre-culture s’organise en réseau mais reste fragile. « People’s Choice Records, un disquaire orienté musique électronique a récemment ouvert ses portes. Et puis, dans le centre historique, il y a le Vertigo, un bar qui propose une programmation alternative. C’est un des endroits où se réunissent les artistes de la ville pour boire un verre et manger en écoutant du rock psyché et de la techno. » Kosh hésite un temps. Le musicien peine à citer d’autres lieux dédiés à la musique électronique dans l’agglomération qui compte pourtant plus de quatre millions d’habitants. Pour animer la vie nocturne de Casablanca, le label auquel il appartient, Casa Voyager, a donc opté pour le système D. « Avec Driss Bennis et Jonas Bengio (les fondateur du label, ndlr.), on a organisé quelques soirées au Vanity, un club généraliste de Casablanca. L’ambiance, c’est plutôt bouteilles et tables VIP. Quand les habitués se sont retrouvés à nos soirées techno, ça leur a fait une drôle d’impression ! », plaisante-t-il.
Hormis le nom du label, hommage à la gare centrale de Casablanca, rien dans la musique de Kosh ne laisse entrevoir ses origines marocaines. Comme le Tunisien DJ Mourad ou les Iraniens Blade & Beard avant lui, le producteur marocain a choisi de ne pas s’inspirer du folklore de son pays. « Je n’ai jamais été attiré par la musique traditionnelle marocaine. J’ai toujours écouté des artistes occidentaux », constate le musicien. Sa peur : être catalogué en tant qu’artiste maghrébin. Un malaise partagé par beaucoup d’artistes originaires du Maghreb, à l’instar de la marocaine ڭليثرGlitter٥٥ qui s’en émouvait récemment dans une interview accordée à Pan African Music. « Je représente mon pays, Le Maroc, mais pas forcément l’office nationale du tourisme, lance Youssef Benjelloun. Le risque, quand on mélange de la musique folklorique et électronique, c’est de se retrouver avec une image qui colle à la peau. Je fais de la techno et il se trouve qu’effectivement, je vis au Maroc. Ça ne devrait pas être extraordinaire ! » Après tout, le monde de Kosh ne se situe-t-il pas quelque part sous l’océan ?