C’est une idée toute simple mais à laquelle il fallait penser. Depuis quelques mois, le Meltdown, un bar à cocktails de Rennes, a décidé de prendre les choses en main pour lutter contre le harcèlement au sein de son établissement. Tout a commencé par un message publié sur le compte Facebook du lieu en question : « Dernièrement, il nous a été remonté qu’en plusieurs occasions des clientes ont été victimes de harcèlement par un client qui, malgré le refus de vouloir communiquer et une mise en garde, a insisté. Que ces clientes soient rassurées, cette personne n’est plus admise parmi nous. Notre établissement ne tolère pas ce genre de comportement. Malheureusement, il est parfois compliqué de le remarquer ou encore de venir le dire de vive voix ou même discrètement. » Pour résoudre définitivement le problème, le Meltdown a décidé de proposer sur sa carte un tout nouveau cocktail baptisé œil d’Horus, dont le nom fait référence à un symbole de protection que l’on offrait aux pharaons dans l’Égypte antique. Pour expliquer le principe de ce cocktail un peu spécial, une affichette est placardée dans les toilettes du bar : « Psss ! Si jamais un client te harcèle, ou si tu ne te sens pas en sécurité avec quelqu’un, va au bar commander un oeil d’Horus. La puce implantée dans le cerveau des barmans les mettra en mode « sécurisation/discussions/résolution ». Il est important pour nous qu’une personne franchissant la porte d’entrée se sente en sécurité. » En résumé, si quelqu’un vous drague un peu lourdement, ou pire en cas de harcèlement ou de situation d’insécurité, ce cocktail fonctionne comme un signal d’alarme envoyé au barman qui se charge alors de vous sortir de cette situation désagréable.
Cette technique n’est pas vraiment nouvelle. Aux États-Unis, depuis quelques années, certains bars ont comme équivalent à l’œil d’Horus un cocktail baptisé Angel Shot tandis qu’au Québec, il prend le nom d’Angelot. Ces initiatives ne sont pas sans rappeler une célèbre campagne anti-harcèlement lancée en 2016 dans les bars de Lincolnshire en Angleterre. L’idée était assez simple : dans la rue, une personne se sentant suivie, harcelée ou en danger peut entrer dans un bar et demander Angela. Avec son nom inspiré de la figure de l’ange gardien, ce personnage fictif sert de nom de code pour signaler aux propriétaires du lieu – prévenus en avance – qu’il faut agir pour aider la personne en détresse. Après l’affaire Weinstein, le concept a été repris en France dans la ville de Rouen ou plus de 22 bars et commerces partenaires ont accepté de jouer le rôle de refuges en venant en aide à celles et ceux qui passeraient la porte d’entrée pour demander où est Angela. En Allemagne, certaines villes ont elles aussi adopté l’initiative a une exception près : c’est cette fois Luisa qu’il faut demander à voir.
Tous ces différents codes mis en place montrent que le monde change peu à peu. Si le harcèlement est malheureusement loin d’avoir disparu pour le moment, il n’empêche qu’une prise de conscience semble tout de même être à l’œuvre dans certains pans de la société. C’est cette transformation progressive des rapports à l’autre et la manière dont elle influence nos conceptions futurs de l’amour que Trax Magazine s’attache à raconter dans son numéro 223 disponible en kiosques. Le temps des summers of love n’est donc pas encore totalement révolu.
Le numéro 223 de Trax Magazine est disponible en kiosques et sur le store en ligne.