Dans quel état d’esprit étais-tu quand tu as composé ce nouvel EP sous l’alias GENER8ION ?
J’ai commencé pas mal de morceaux sur la route, quand je tournais aux États-Unis. Puis je l’ai finalisé en début d’année à Paris. C’est un disque un peu moins surproduit que ce que j’ai pu faire avant, j’ai voulu que le son soit brut, quasiment riddim en fait, plus instinctif. je l’ai produit assez vite pour garder une certaine spontanéité. D’habitude, je suis du genre à passer des mois sur un morceau… pour, au final, revenir aux démos. Elles ont un côté plus séduisant et spontané. La musique club doit venir d’une manière naturelle, instinctive à mon avis. Beaucoup de morceaux-phares de la musique électronique qui m’ont influencé ont été créés en une demi-heure par un mec dans son studio avec une boîte à rythme. C’est l’énergie que je voulais pour ce disque.
Tu sors en complément de l’album une publication papier, Unite or Perish. Pourquoi s’être lancé dans un format magazine plutôt qu’un clip ou un site interactif ?
L’idée de lancer une publication était quelque chose qui me tenait vraiment à coeur depuis très longtemps. J’achète énormément de livres, j’aime l’objet en général. Avec Marble, le label que j’ai monté avec Bobmo et Para One, on ne faisait que des sorties en digital. Ça faisait un bout de temps que mes productions n’avaient pas de format matériel, quelque chose à tenir entre les mains ! L’image sur papier a un impact incomparable par rapport à l’écran, le contenu imprimé noir sur blanc ou publié sur Tumblr n’a pas le même attachement émotionnel.
Cette publication s’est faite de manière organique. A la base, il s’agissait du livret qui accompagne l’album. Petit à petit, des gens se sont greffés au projet : M.I.A, avec qui j’avais déjà travaillé, Romain Gavras, qui est un vieux pote, David Rudnick, qui est mon graphiste, Julien Dossena, etc. Je me suis donc retrouvé avec quelque chose d’assez conséquent – avec 128 pages – qui devait exister séparément, même s’il a été pensé pour coller avec l’esprit de l’album.
Il y a aussi une exposition prévue pour la release party de l’EP…
Oui ça sera un prolongement IRL du magazine. L’idée est de retranscrire en volume Unite or Perish.
GENER8ION est donc un projet transmédia ?
C’est un projet un peu plus global en termes de création par rapport à Surkin, oui.
Comment t’es-tu connecté avec M.I.A. ?
J’ai commencé à produire des remix pour elle sous l’alias Surkin, puis elle m’a demandé de produire deux morceaux sur son dernier album, “Only 1 U” et “Bring The Noise”. C’est donc assez logiquement qu’elle a travaillé sur mon album.
Un autre artiste qui revient souvent – ça te rattache un peu plus à la French Touch puisqu’il a travaillé à plusieurs reprises avec Daft Punk – c’est Todd Edwards…
C’était une de mes premières grandes influences. Je l’ai donc appelé pour qu’il remixe mon morceau “Next of Kin”, en 2008. Il avait accepté, alors qu’à cette époque, il avait totalement arrêté de composer de la musique… Ça a dû lui redonner l’envie. On l’a invité à Paris quelque temps après avec Sound Pellegrino. J’admire énormément son travail.
Pour beaucoup, tu es un des ambassadeurs de la French Touch et ce qui a suivi après. Ce son français, qui a disparu des dancefloors parisiens, a finalement fait le chemin inverse : à la base, il trouvait davantage écho à l’étranger, puis il a explosé dans son pays. Aujourd’hui, ce son est très minoritaire dans la scène électronique parisienne mais il a clairement gardé son cachet hors de ses frontières.
Mes premiers mix, c’était de la Chicago house, donc je ne sens pas d’antagonisme. Quand je vois les line-up de Concrete, j’ai envie d’y aller, ce ne sont que des gars que j’admire… Je me suis toujours battu contre les divisions entre les scènes. Quand on faisait les soirées Institubes, on passait du rap “de club” et du Aphex Twin ! Sur le label, on sortait aussi bien de l’IDM que de la musique club plus abordable et directe… Tout ça, ce sont des séparations arbitraires. On voyage tous beaucoup donc c’est dur de suivre tout le temps ce qu’il se passe à Paris malheureusement.
Que penses-tu de cette scène parisienne justement ? C’était où ta dernière soirée à Paris ?
Je n’y suis plus trop le week-end, même si j’y habite. C’est con mais je ne suis pas là quand les producteurs que j’aime passent…
Tu fais maintenant partie de Bromance, un crew très soudé avec une identité musicale et esthétique qui lui est propre. Est-ce que tu as l’impression de faire partie d’une génération ?
Oui, dans le sens où il y a une tradition assez parisienne de casser les codes et d’envoyer bouler les formats. Même si la techno old school, le rap et la Chicago house m’ont énormément influencé et comptent toujours beaucoup pour moi, je suis sorti de ce format. La musique à Paris a toujours été hybride. Ça ne m’intéresse pas trop de refaire de la techno de la fin des années 90 même si j’adore la techno minimale berlinoise et que j’allais choper des vinyles chez Hardwax à 18 ans…
Tu as découvert la musique électronique à Berlin ?
C’est là où j’ai découvert la culture club en tout cas, il y a douze ans maintenant ! C’était un âge d’or, j’y suis allé plusieurs années d’affilée, cette période m’a beaucoup marqué. À la base, je viens d’un milieu qui est plus rap / hip-hop, j’ai basculé dans la musique électronique à cette époque. Ce n’est pas la French Touch qui m’a fait tomber dedans, même si je m’y suis mis en découvrant qu’ils étaient très influencés par Chicago, Daft Punk période Homework par exemple. En fait, la musique électronique, je l’ai plus découverte sur Internet, quand j’ai eu ma première connexion (rire)… Je parlais à des mecs de Chicago pour échanger des morceaux. Mais Berlin, j’en garde de super souvenirs : le WMF, le Watergate… Il se passait plein de trucs cool. C’était l’endroit le plus intéressant en musique électronique. À l’époque, en tout cas.
Trax vous fait gagner un exemplaire de Unite Or Perish ! Pour cela, il vous suffit d’envoyer un mail à l’adresse suivante : concours@traxmag.com (objet : Surkin).
GENER8ION jouera le 4 mars prochain au Showcase à l’occasion de la release party de son nouvel EP, et présentera une série d’installations exclusives au Redbull Space, à Paris. Vous pouvez vous procurer votre place juste ici.