Comme chaque année, la programmation des NS Days de Nuits sonores donne carte blanche à quatre artistes qui choisissent et construisent, un jour chacun, leur line-up comme ils l’entendent. L’occasion pour eux de donner au public une vision plus directe de leur identité, de leurs goûts et aspirations. Cette année, les clés ont été laissées à Jennifer Cardini, Daniel Avery, Four Tet et Paula Temple. Les curateurs de la deuxième et de la dernière journée ont d’ailleurs accepté de répondre à nos questions.
Comment avez-vous réagi lorsque Nuits sonores vous a proposé d’être curateurs pour ses journées ?
Paula Temple : Je me suis sentie profondément honorée.
Daniel Avery : C’est un honneur pour moi. Nuits sonores est mon festival préféré, il me soutient depuis mes débuts. C’est la cinquième année consécutive que j’y joue, et c’est chaque fois de mieux en mieux. J’ai le sentiment que ma relation avec le public lyonnais est privilégiée grâce à ce festival.
Ça vous est déjà arrivé d’être curateur d’un évènement de cette envergure ?
PT : Une fois seulement, mais pour un événement à plus petite échelle où j’ai dû organiser un showcase pour Noise Manifesto à Berlin de 500 personnes. Les trois scènes qu’offre Nuits sonores constituent l’opportunité de donner une vision plus large de mes inspirations et de ma personnalité musicale, qui va bien plus loin que juste de la techno qui tape.
DA : J’ai organisé une soirée à Londres appelée Divided Love, et Nuits sonores m’a confié une scène il y a quelques années, avec Voices From The Lake et Factory Floor. C’est très inspirant de mettre sur pieds de tels line-up et d’être entouré par ces artistes.
Saviez-vous tout de suite qui vous vouliez inviter ?
PT : Oui, immédiatement, et j’ai donné une liste deux fois plus longue que celle finalement sélectionnée.
DA : Le line-up s’est formé dans ma tête très rapidement et c’est exactement celui que vous allez retrouver. Tout s’est parfaitement coordonné, les étoiles se sont alignées.
Quel est le thème global derrière ces line-up ?
PT : Des artistes qui contribuent de façon importante et contemporaine à la musique électronique.
DA : Je suis fan de musique psychédélique. Pour moi, ça signifie toute musique qui te prend par la main et t’emmène ailleurs. Ça peut être le kick profond d’un morceau de techno, la reverb d’une guitare ou le bourdon infini d’une piste d’ambient. Pour moi, ils occupent tous le même espace dans ma tête, la musique s’y perd. Voilà quelle était mon idée globale pour ce line-up.
Paula Temple, vous n’avez invité quasiment que des femmes, et Daniel Avery, un chiffre égal d’hommes et de femmes. Ce choix s’est-il fait naturellement, ou était-ce important pour vous ?
PT : Ce sont avant tout des personnes qui représentent le mieux mes goûts musicaux.
DA : Tous les artistes programmés défoncent. Ils ont tous leur place ici, on n’essaie pas de remplir les quotas. Je suis sincèrement très fier de faire partie de cette programmation.
Pendant Nuits sonores, énormément d’événements auront lieu partout dans Lyon. Quel serait le temps fort de votre programmation que vous ne conseillerez à personne de manquer ?
PT : Je pense qu’il serait dommage de louper le live de Moor Mother, SOS Gunver Ryberg, Aisha Devi et Pan Daijing, sur la scène Live. C’est une performance unique et très spéciale. Ces artistes nous touchent bien au-delà que par le seul plaisir de la danse.
DA : J’encourage tout le monde à prendre le temps de s’éloigner des sets clubs et d’aller voir les performances live d’Alessandro Cortini, Tropic Of Cancer et Lanark Artefax. Ils ont tous le secret d’une musique incroyablement envoûtante qui nécessite un peu de patience. Si vous prenez le temps d’aller les voir, vous repartirez le coeur plein d’une inspiration sincère.
Qu’aviez-vous en tête lorsque vous avez sélectionné ces artistes, vis-à-vis du public ?
PT : Je voulais que chaque scène soit éclairée par une couleur différente, venant toutefois du même prisme, équilibrant et complétant les autres pour ne faire qu’une. La première scène est lourde et physique, la deuxième plus cathartique et métaphysique, la troisième rétrofuturiste et exaltante. Je n’ai pas voulu choisir des noms trop évidents, et je compte sur le fait que le public de Nuits sonores me fera confiance. J’ai aussi tenu compte de la fréquence à laquelle ces artistes se sont produits à Lyon, et j’ai été surprise de découvrir que beaucoup, comme DJ Stingray, ne sont que très peu – voire jamais – venus ici.
DA : Le public français m’a toujours offert une grande liberté et beaucoup de bienveillance. Je savais que je pouvais faire ce que je voulais avec ce line-up ; je sens une grande confiance mutuelle entre nous. Cette sélection est une bonne représentation de mes goûts, elle me ressemble beaucoup. Je suis impatient de la partager avec le festival.
Y a-t-il quelqu’un que vous auriez aimé faire venir et qui n’a pas pu ? Quelqu’un à faire (re)découvrir à nos lecteurs.
PT : Je pense à la Libanaise Renata Sabella. C’est une des meilleures DJ’s de techno industrielle qu’il m’a été permis d’écouter.
DA : Tous ceux à qui j’ai proposé de venir ont dit oui. Mais je vais rester au festival quelques jours et assister à quelques performances comme celles de Karen Gwyer, Four Tet, James Holden, Paula Temple, rRoxymore, DJ Stingray… C’est décidément une année très spéciale.
Daniel Avery et Paula Temple seront respectivement curateurs des NS Days 2 et 4, lors de Nuits sonores 2018 du 6 au 13 mai prochains. Le premier y invite DJ Nobu, Helena Hauff, HAAi, Lena Willikens, Dr. Rubinstein, Objekt, Call Super, Alessandro Cortini (live), Tropic Of Cancer et Lanark Artefax. La deuxième, elle, convie Femanyst, Rebekah, Amelie Lens, SØS Gunver Ryberg, Moor Mother, Aïsha Devi, Pan Daijing, rRoxymore, BOBBIE* et DJ Stingray.
Pour plus d’informations sur la programmation complète et la billetterie, rendez-vous sur le site de Nuits sonores.