Cet article n’en est pas un : il a été publié le 1er avril 2020 et constitue un récit fictif.
« C’était quand même marrant. » Installé à la table de son salon, Ricardo Villalobos, rasé de près, se sert un second lait fraise. « Aujourd’hui, je me dis que j’ai eu de la chance ». Entre ses mains, le DJ germano-chilien tient des photos sur lesquelles il apparait méconnaissable. «Voilà, ça, ce sont mes années chloro », décrit-il, un tremolo dans la voix.

Chloro pour Chloroquine. En 2004, Ricardo Villalobos entame une tournée dans plusieurs villes d’Amérique centrale. Dans l’après-midi du 9 au 10 octobre 2004, un moustique le pique alors qu’il se repose à Bogotá après un after musclé. « J’ai contracté le palu. C’est de ma faute : j’ai toujours eu peur des vaccins et je n’ai pas pris mes précautions avant de partir », regrette-t-il aujourd’hui.
Rapatrié en Europe, le DJ est pris de fièvre intense. « Je confondais les rêves et la réalité. Je me souviens qu’au pic de la fièvre, j’avais l’impression de voir des DJs partout autour de moi, qui m’observaient et me pointaient du doigt en riant », ressasse-t-il. Admis à l’hôpital, les médecins le pensent perdu. Son seul espoir de guérison réside dans les travaux d’un médecin sulfureux : Didier Raoult.
Le professeur de médecine mène à l’Université Aix-Marseille des travaux sur une molécule, un puissant anti paludique appelé chloroquine. Mais ses conclusions ne font pas l’unanimité. Présenté par ses équipes comme une solution aux crises sanitaires en Afrique sub-saharienne, le professeur est moqué par de nombreux confrères et consœurs pour son excentricité. Mais voilà, Ricardo Villalobos n’a plus une seconde à perdre. Son état est critique.
Le professeur grimpe dans un hélicoptère direction Berlin, où le malade gît. Quelques heures plus tard, il injecte une dose de chloroquine pure au DJ. « Ce geste m’a sauvé la vie mais a aussi signé le début de mon calvaire », témoigne aujourd’hui Ricardo Villalobos qui entame son cinquième lait fraise.
La fièvre du DJ chute de façon vertigineuse et provoque chez lui un gain d’énergie puissant. « J’éprouvais de l’amour pour tout le monde, j’avais un sentiment de bonheur très puissant et je suais à grosses gouttes. » Didier Raoult observe les effets de son traitement sur le patient et prévient : « Certains effets secondaires sont provoqués dans de rares cas par la maladie, prenez garde ». Le professeur monte à bord du premier vol pour Marseille mais laisse au convalescent quelques doses de chloroquine supplémentaires, en cas de rechute.
Ricardo Villalobos reprend alors sa tournée avec le succès que l’on connait. Mais, dans son sac de disques, partout avec lui, il emporte la précieuse substance. « Quand j’avais un léger coup de mou, surtout si je faisais le closing d’une soirée, je prenais un coup de chloroquine. Très vite, j’en ai parlé à des amis et on a commencé à en consommer régulièrement ». Mais les doses laissées par le professeur Raoult s’amenuisent et le DJ se voit contraint de s’approvisionner sur le dark web. « Je dépensais tous mes cachets de DJ en chloro. Quand je n’en prenais pas, la fièvre revenait, plus puissante encore. Jusqu’au jour où le professeur Raoult a appris ma situation. »
Didier Raoult décide de placer son ancien patient en confinement. Pendant plus d’un mois, le DJ se voit assigné à résidence. « On m’obligeait à imprimer une attestation de déplacement dérogatoire pour aller faire mes courses », détaille-t-il à propos de son calvaire.
Au bout de 30 jours, les symptômes de manque disparurent. Le DJ était sauvé. Depuis, il n’a plus jamais touché à la chloroquine. « Il faut être très vigilant et attendre les résultats des tests afin de savoir si cette molécule peut être utile à d’autres », conclue le DJ, entre deux gorgées de lait fraise.