Comment Simo Cell utilise le hasard pour créer cette techno que tout le monde s’arrache

Écrit par Trax Magazine
Photo de couverture : ©DR
Le 28.09.2018, à 15h36
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Écrit par Trax Magazine
Photo de couverture : ©DR
À l’âge de 15 ans, Simo Cell mixait déjà dans les bars de son Nantes natal. Aujourd’hui résident de Rinse France et produit par des labels tels que Livity, BFDM ou Timedance, il se distingue par ses influences anglo-saxonnes auxquelles se mêle une techno venue tout droit de Detroit. Il dévoile à Trax ses secrets de fabrique et la relation qu’il entretient avec son logiciel fétiche, Ableton.En partenariat avec Ableton.


Article initialement publié dans le TRAX n°213 en juillet 2018, disponible ici

Par Simo Cell

 

Il faut démystifier le travail de production, et donner toute sa place au hasard et à l’instinct. Lorsqu’on commence la production, on a d’abord tous cette image en tête de l’artiste dans son studio, avec ses machines et plein de câbles dans tous les sens. Moi, au départ, sur mon ordinateur, je ne me sentais pas producteur, j’avais un peu honte. Un vrai producteur, c’est quelqu’un qui bougeait des boutons sur des machines, et qui devait câbler ses propres trucs. Cela m’a pris du temps. Je me suis même trouvé un studio pendant un temps, avec plein de machines, pour quitter mon ordinateur et me mettre au 100 % analogique. Mais au bout de six mois, j’ai réalisé que je n’avançais pas et que je revenais tout le temps vers l’ordi. Je me suis rendu compte que je m’amusais plus sur ordinateur que sur machine, et j’ai compris qu’il n’y avait pas une seule bonne façon de produire. Il y a des millions de chemins, et le but est simplement de trouver la sienne pour être à l’aise.


Eh bien, c’est la même chose pour la production. Quand on commence sur Ableton Live, le réflexe bloquant est de se dire : « Je ne connais pas suffisamment de choses pour pouvoir faire mon morceau, j’ai besoin d’en apprendre plus. » Et on se lance dans les tutoriels. C’est bien de savoir comment ça fonctionne, mais à un moment, il faut aussi lâcher prise, et y aller : prendre des effets, les mettre à la suite, voir ce que ça donne, et tirer le fil. Et plus tu tires ce fil, plus les idées sortent. C’est comme sur Internet : tu y vas pour chercher quelque chose, et puis tu tombes sur autre chose, etc. Au début, tu peux passer des jours sur un kick pour qu’il sonne bien. C’est un des pièges à éviter.


Ma méthode, c’est d’abord les idées, et ensuite le son. Je pars du principe qu’Ableton est un peu mon cahier de brouillon. Je crée énormément d’idées avec différents packs de drums, de synthés, même si les idées n’ont rien à voir ensemble. Je laisse mon cerveau en roue libre, j’écris plein de choses, et seulement ensuite, je ferai le point et je me mettrai à travailler. Beaucoup de ces idées ne vont pas me servir, ou peut-être pour un autre projet, mais le but est d’éviter de rester bloqué, de tourner en rond, ou de passer des heures sur le même élément. Je me fais deux sessions de trois heures comme ça sur une ou deux journées. Il faut aussi apprendre à ne pas trop travailler, à compartimenter, parce qu’à un moment, tu n’es plus efficace.

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Concrètement, quand j’arrive devant mon ordi le matin, en fonction du mood du jour, je définis un BPM, un peu aléatoirement. Tiens, j’ai envie de faire un track plus rapide, ou plus lent. Ça commence toujours par le choix du BPM. Dans la barre de recherche, je tape un mot, un peu au hasard, genre trois lettres, et je regarde les samples qui tombent. J’aime bien laisser faire le hasard. J’utilise aussi beaucoup de séquenceurs aléatoires : je lance des séquenceurs qui vont eux-mêmes générer des patterns, puis je choisis les idées qui m’intéressent. J’avais l’habitude de dire que je choisis les erreurs qui m’intéressaient. Mais ce sont plus des hasards que des erreurs, c’est une danse de sons, de samples et de drums dans tous les sens, et ensuite, tu choisis les hasards qui t’intéressent. Après trois ou quatre heures où je vais lâcher plein d’idées, j’ai suffisamment de contenu pour commencer à écrire, à faire un séquençage à partir de cinq ou six d’entre elles.


Mon astuce, c’est de commencer deux ou trois morceaux à travailler en parallèle. Généralement, je commence un premier morceau, puis au bout de trois heures, je l’arrête et j’en commence un autre. Je fais le séquençage, puis je bosse sur ces deux morceaux en parallèle. Ça me permet de bosser toute la journée en gardant les idées fraîches, et d’être efficace. Une fois que j’ai les idées, la structure sur cinq minutes, il va sonner super brouillon et mal. Là commence le travail du sound design, où je reprends vraiment la main pour sculpter, affiner, embellir le son. Je passe autant de temps sur le mixage que sur la composition. Cette partie-là est hyperimportante. L’idée, en travaillant comme cela par étapes, c’est de garder un côté ludique et un peu marrant. Et le jour où je ne m’amuserai plus en allant au studio, je pense que je ferais autre chose.


Simo Cell sortira en octobre un split EP avec Peter van Hoesen sur LaVibe, le nouveau label de Brice Coudert, programmateur de Concrete.

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