Un subtil jeu de raffinements, quelque chose d’évanescent et d’un peu nostalgique aussi, que l’on retrouve dans la palette d’émotions et de « couleurs » que déploie Chloé dans sa musique. La rencontre entre les deux artistes, pour réaliser la partie visuelle des maxis et de l’album de notre rédactrice en chef invitée, ne pouvait donc qu’être heureuse. « Il y a cette part commune de rêverie oui, certainement », convient la photographe, vidéaste et sculptrice française, désormais basée entre Paris et Londres. « Mais c’est aussi ce rapport entre ces sons qu’elle enregistre et les sons électroniques, ce pont entre la nature et les machines, cette balade entre les deux, que j’aime beaucoup dans sa musique. C’est comme dans mes images, où il y a toujours du naturel, un paysage, et aussi du construit, du fait par l’homme. Tout mon travail est à propos de ce mélange, ce mariage et cette friction entre les deux. »
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De fait, la photographie de Noémie Goudal – tout comme ses monuments extraordinaires que l’on croit dénichés au détour d’une expédition fantastique – est construite par étapes. D’abord imprimées sur papier, ses prises de vue de ponts, de bâtiments et d’escaliers sont ensuite contrecollées sur du carton, puis assemblées dans un décor naturel pour mieux créer l’illusion du réel et bousculer l’imaginaire du spectateur. Une juxtaposition de samples de l’existant pour construire un monde cinématique qui a accroché l’œil de Chloé, rencontrée par l’intermédiaire du BAL, ce centre d’art réservé aux œuvres de l’image, situé non loin du studio de la DJ et productrice, dans le 18e à Paris. Contrairement à ses précédentes collaborations avec des compagnies de danse et de théâtre – dont une scénographie de papier qui « fondait » au contact de l’eau pendant une heure –, c’est la première fois que Noémie travaille au contact d’une musicienne.
« Chloé avait déjà composé plusieurs morceaux de l’album lorsque je l’ai rencontrée, je l’ai entendue en parler, j’ai écouté plusieurs versions des morceaux. J’ai l’impression d’avoir suivi le développement, tout le processus. » Rebondissant sur son travail dans la région des lacs séchés du désert de Californie (série qui sera présentée fin octobre à la galerie Les Filles du Calvaire et dont nous publions ici quelques images en avant-première), Noémie Goudal proposa de réaliser une image exclusivement destinée à la sortie de l’album. « Les constructions du désert sont beaucoup plus grandes que celles de la série des observatoires. Chacune fait entre 4 et 5 mètres de hauteur, et est composée de 20 à 25 cubes en bois d’un mètre de côté. Pour la pochette, nous avions prévu une structure de 16 cubes. Nous avons fait plusieurs essais, dont un avec deux cubes seulement qui avait lieu en fin de journée, avec une lumière très particulière. L’image était plus forte que toutes les autres. J’ai envoyé les deux photos à Chloé, au cas où, et bien sûr, elle a choisi celle-ci. Ça fait partie des heureux accidents du travail. »