Par Denis Mitaut
Pour la première fois, Trax était invité sur l’une des scènes du festival, la Blue Stage, pour faire découvrir des sonorités techno (Boddika, Minimum Syndicat, Tessela, DJ Bone ou encore PEEV) à un public venu principalement voir des artistes plus mainstream. Notre curiosité nous a donc naturellement poussés à aller glisser une oreille du côté des autres stages, afin d’écouter ce qu’il s’y trame réellement.
Les premiers festivaliers que nous croisons ne manquent pas de nous appeler « Monsieur », ce qui prête à sourire. À l’entrée du festival, une piscine remplie d’une eau boueuse laisse deviner que la pool party annoncée a déjà eu lieu. Tout près des enceintes se trouve une demi-douzaine de kids, qui réalisent une chorégraphie sur une musique agressive qui sature littéralement. Une bière à la main, nous nous dirigeons vers la main stage en espérant que le son y soit un peu moins violent.
Nous passons devant des manèges géants et une grue, où l’on peut faire des sauts à l’élastique. Nous sommes ici à un croisement entre une fête foraine et les festivals habituels, et le public a l’air d’apprécier. Beaucoup de gens sont déguisés ou recouverts de poudre colorée, la hauteur de boue sur les chaussures permet par ailleurs de deviner l’heure d’arrivée au festival ─ les premières ayant été particulièrement humides.
Arrivés en face de la main stage, sous un soleil désormais radieux, nous découvrons un impressionnant mur d’écrans LED surmonté de dispositifs pyrotechniques crachant du feu pendant les sets. Au cœur de cette scénographie à l’américaine, Bob Sinclar est aux platines et la foule assez compacte est déjà chauffée à blanc. Le DJ star est dans son jardin et met l’ambiance avec des « Paris lève tes mains ! », « ça va Chatou ? » ou encore « ici c’est Paris ! ». La foule se déhanche, tape dans ses mains et sautille sur les titres de Guru Josh Project, Gregor Salto ou encore de Bob lui-même qui balance “Someone Who Needs Me”.
Non loin de là, sur la Blue Techno Stage, Tessela a du mal à rivaliser pour attirer le public parti en masse écouter la tête d’affiche du festival. Quelques dizaines de têtes seulement ; certains dansent, d’autres chillent… Devant la scène, une douzaine de personnes saute en bande, comme montée sur ressort ; attitude très « EDMesque », et pas forcément en rythme avec la musique de Tessela. On apprécie « Midnight Sun » de Blue Hour, qui clôture son set, même si les basses du sound-system semblent particulièrement saturées.
Puis Joachim Garraud présente lui-même au micro Julian Jeweil, qu’il qualifie de «boss de la production ». Dès les premières minutes, le ton est donné : basses puissantes, caisses claires bien rythmées avec en fond des mélodies dark assez entêtantes qui confèrent au set un côté bien deep et dansant. Le DJ est concentré, comme toujours, sur son mix, esquissant de rares sourires en voyant les réactions du public. On reconnaît le nouveau track de Sam Paganini « Elevator », ou encore le remix par Julian de « Fuego » de Dubfire & Oliver Huntemann. Le public en redemande et la foule est de plus en plus nombreuse. Nous interrogeons un groupe de jeunes de Compiègne, à l’énergie débordante, qui surkiffe le son car dans leur ville « il est impossible d’écouter de la techno. » Ils ne connaissaient pas Julian mais, après avoir vu son nom sur l’affiche, ils avaient écouté avec curiosité ses tracks avant de venir au festival. La Blue Stage semble donc faire son effet auprès d’un public assez jeune et nourri à l’EDM. Le set durera finalement 2 heures au lieu des 1h30 prévues, captivant jusqu’à sa clôture.
On retrouve ensuite le producteur anglais Boddika avec sa techno plus minimaliste, très épurée et pointue pour un public non averti. Malgré la qualité et la précision du set, le public déserte petit à petit, sans doute parti écouter Laidback Luke, un des gros noms programmés en même temps sur la Main Stage. Nous y faisons un rapide passage, le temps de faire un grand écart musical vers un set 100% EDM sans grande surprise, si ce n’est quelques mesures de Vitalic que l’on a eu le temps de repérer entre deux morceaux.
En passant près de la scène 100 % DJ’s français (BBR stage), nous reconnaissons le riff de basses de « We Are Your Friends ». Arrivés face à la scène trance (Red Stage), nous intégrons une foule assez dense. C’est Stryker aux platines, et son énergie est communicative. Sur les écrans, nos yeux sont captivés par des motifs psychédéliques alors que le DJ envoie une de ses prods suivie par un « Firestarter » de Prodigy qui fait toujours plaisir à entendre. Le temps de se rendre compte qu’il est impossible de commander à manger sans faire une heure de queue, nous reprenons une bière. Direction la Blue Stage.
Il fait nuit et les motifs géométriques de la scène ont maintenant pris une coloration fluo. DJ Bone est derrière les platines et les festivaliers sont de retour. Le beat est efficace, on est dans de la techno « pure Detroit style », le public y trouve son compte en dansant de tout son soûl. Le son est bon et la fin du festival approche. L’audience est moins jeune que sur les autres scènes, il n’y a plus de déguisement, juste des puristes venus spécialement écouter le patron du label Subject Detroit Records, prêts à en découdre sur le dancefloor boueux. DJ Bone régale en envoyant le classique « The Bells » de Jeff Mills, puis en enchaînant avec « Never Grow Old » de Floorplan.
Pour finir, la curiosité nous pousse vers la main stage où Joachim Garraud est aux platines et se déchaîne pour la clôture de « son » festival. Il joue en live la mélodie de « Meet Her At The Love Parade » sur son synthé, puis remixe les paroles de « Music Is The Answer » de Danny Tenaglia sur fond d’EDM, avant d’enchaîner avec « Domino » d’Oxia qui met tout le monde d’accord, le tout sous une explosion de lasers, serpentins et autres effets pyrotechniques assez incroyables. Il est presque minuit, le festival touche à sa fin et nous prenons la direction du RER, en nous disant que l’idée de cette scène techno était quand même plutôt bonne. Alors, pourquoi ne pas revenir l’an prochain ?