Chronique : Actress – AZD

Écrit par Trax Magazine
Photo de couverture : ©Actress
Le 30.01.2018, à 17h22
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©Actress
Écrit par Trax Magazine
Photo de couverture : ©Actress
« J’essaie d’expliquer aux gens qu’il ne s’agit pas seulement de musique », souffle Darren Cunningham, alias Actress, qui entreprend avec son cinquième album AZD un retour à un rapport charnel avec ses machines.


Par Bruce Lévy


Après Ghettoville, les rumeurs sur la mise en retraite du projet Actress affolaient la toile et l’électronique britannique. « Le résultat de Ghettoville était la mort complète de mon persona », explique Darren Cunningham au bout du fil depuis Londres. « Le grisâtre est devenu plus luisant et réflectif » sur AZD, son cinquième opus qui marque près d’une décennie d’albums, lui forgeant un statut d’artiste dont chaque nouvelle apparition est un événement. Actress en a fini avec les compositions de pastelliste. L’homme à l’air grave (voir ses photos) a choisi de sauver son personnage de la neurasthénie sonique – conduisant manifestement au cimetière – pour lui donner un coup de Botox. « L’album devait s’appeler The Anatomy of AZD. J’ai fait beaucoup d’enregistrements jusqu’à ce que j’arrive à recycler Actress, à le purifier et à le mouler dans une différente machine. » Volontiers fumiste (il consomme aussi bien Alexander McQueen que Gerhard Richter en passant bien sûr par la ganja), Darren Cunningham était passé maître dans la composition d’albums aux recettes inextricables, notamment sur le post-dubstep Hazyville (Werk Discs, 2008) et R.I.P. (Werk Discs, 2012), qui flirtait déjà dangereusement avec la faucheuse au gré d’une électronica suavement post-mortem. S’y ajoute le don de Cunningham pour le marketing – le terme de « R&B concrete » sorti du chapeau en même temps que Splazsh (2010), a permis de fertiliser (ou pas) son champ de force toujours plus riche en public. Et pour couronner le tout, de toujours (ou presque) accompagner ses herbiers de références subsidiaires, ici du futurisme gothique de Rammellzee et des constructions mystiques de James Hampton. « Tout a commencé parce que j’étais fasciné par le pouvoir du langage ; quand tu nais, tes parents te donnent un prénom, ils changent ton identité pour toujours. » Outre ses différents pseudonymes (Levantis, Bank Of England…), notre Britannique n’a pas cessé de chercher le rôle phare d’Actress dans l’infinité du langage MIDI. « Mon langage est devenu lui-même extrême dans le processus ; la musique devient plus alien, elle vient d’une autre dimension. » AZD ne fait pas exception à la versatilité prismatique coutumière d’Actress, qui se montre aussi bien joueur (Fantasynth) que tragique et aphexien (Faure in Chrome). On constate néanmoins le début d’un processus de désinfection de son esthétique lo-fi, l’abandon de la sub-bass, du 2-step garage et des ondes abrasives de FM au profit de synthétiseurs bien allants (Visa). Toujours avec cette même malléabilité manifeste de quelques rares artistes tels que Laurel Halo, AZD entame le glissement d’Actress vers une IDM aux courbes moirées proche de Kuedo et Patten. « Je travaille déjà sur mon prochain album », avoue Actress, qui aura profité de son bref passage dans l’au-delà pour écrire le premier chapitre de sa nouvelle saga de chrome.

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