Par Brice Henry
« On est plein, on est zinzin ! » Cette punch de Caba et Jeanjass résume assez bien la deuxième édition du Paco Tyson, qui s’est tenue à Nantes le weekend du 27 avril. Une nouvelle fois, C.H.I.C.H.I et DISCORD ont mis bien les quelque 17 000 festivaliers avec trois scènes et ambiances, 17 kilos de son, des jeux de lumières dignes d’un trip sous acides et un mélange savamment dosé de têtes d’affiches et d’artistes plus confidentiels. Depuis la première édition du festival, l’objectif des deux tauliers, respectivement membres de Fragil et Sweat Lodge, est de faire le pont entre l’univers feutré des clubs et celui, plus dirty, des raves et autres fêtes extrêmes. C’est chose faite. À l’instar d’Astropolis, souvent perçu comme le grand frère de l’Ouest, ce qui fait la saveur du Paco Tyson réside tout autant dans l’état d’esprit des organisateurs que dans celui des festivaliers qui viennent y chercher une bonne dose de musique et de simplicité. Loin des sirènes de l’EDM et des autres saloperies du même genre, on peut dire sans trop se tromper que cet évènement est plus que parti pour prendre racine dans le paysage nantais, pourtant déjà bien chargé en matière de BPM. Pour ce deuxième épisode, autant dire que l’on a encore pas mal ramassé, et que nos neurotransmetteurs se sont, une fois de plus, retrouvés en sous-effectif à la fin de la partie.
Laurent Garnier, Zoltan x Oksa, Ricardo Villalobos, Jef K, Shanti Celeste, I n A e t e r n a m V a l e, Ellen Alien, Robert Hood, Karenn, Antigone x Francois X, Jayda G ou encore Mister Saturday Night ont sali un public conquis et chauffé à blanc par un trajet en navette où se gratter une oreille relevait parfois de la performance. On salue d’ailleurs au passage cet étudiant en école de commerce qu’une surdose d’alcool avait rendu un peu trop confiant et qui nous a gratifié de plusieurs « les zadistes, ça pue ! » tout en lâchant quelques petits molards dans le peu d’espace qu’il y avait à nos pieds.
Trois scènes, trois ambiances donc, même si, à part un ou deux passages furtifs, nous n’aurons pas beaucoup mis les pieds sous le chapiteau de la Mutation Stage dédié aux musiques « engagées », entre trance et hardcore. On était plus enclins à scotcher les lumières qui défilaient sur le sol et à prendre en photos des gens aux styles vestimentaires tout aussi engagés.
Le vendredi, ce sont les producteurs nantais, Oksa et Zoltan qui ouvrent le feu sous le Dôme, la mainstage, avec un B2B house devant un public encore clairsemé. Heureusement, le peu qu’on en a vu nous fait dire qu’il va falloir opérer un marquage individuel et suivre de près ces deux bipèdes. S’en suit le set de Jef K. Croisé en sortie de scène, le néo-Nantais, qui nous a servi un bon vieux « Jesus Loves The Acid » à pleine puissance, à l’air de sortir d’une séance de rameur. Vidé, transparent, mais une bière à la main, il confie que Laurent Garnier a plus que validé les deux heures qu’il vient de passer sur scène. Présent dans la scène house depuis les années 90, directeur de plusieurs labels et baroudeur ayant joué dans les clubs du monde entier, son feedback fait plaisir. Et c’est justement à lui d’enchainer. Au bout d’une heure, un membre de l’équipe F-Com avoue que ça fait un petit moment qu’il ne l’a pas vu jouer comme ça.
Direction la Velvet Stage (scène à 360°) pour le passage de la Chilienne Shanti Celeste, qui vaut bien le live de Laurent Garnier. De retour sous le Dôme, c’est Ricardo Villalobos qui a pris le relais. Lui succède alors un B2B avec Laurent Garnier et Jef K, pour un closing d’exception.
Le lendemain, tout s’accélère quand Ellen Alien débarque sous le Dôme. Toujours dans la violence et la propreté, jamais dans la gratuité, la fondatrice du label BPitch Control a cassé des nuques dans les règles de l’art. Entre froideur, maitrise et kicks tout droit sortis d’usine, c’est l’un des meilleurs passages du weekend.
Tout comme celui de Jayda G, même si ce n’est pas la qualité de ses transitions qui la caractérise le plus. Mais après Ellen Alien, c’est tout ce dont on avait besoin. Avec une énergie communicative et des tubes comme « Ain’t No Moutain High Enough » ou « Diva (Get Down on Ur Knees mix) », on avait envie d’embrasser la Canadienne aussi fort qu’un kebab en fin de soirée. Après, tout se bouscule et il est difficile de se souvenir des évènements de manière linéaire. Robert Hood, Mister Saturday Night et Karenn marquent tout de même les esprits. Ce qui est sûr, c’est qu’il faudra prévoir plus de bus de retour l’année prochaine, pour éviter les mouvements de foules et écrasements au moment de franchir les portes. Malgré ce bémol, C.H.I.C.H.I, DISCORD et toute leur équipe transforment l’essai avec cette seconde édition, plaçant Paco Tyson sur la carte des festivals qui savent mélanger les genres, entre club et rave party, sans en dénaturer l’état d’esprit.