La mort de George Floyd, qui succède à celle de Breonna Taylor, Ahmaud Arbery et de bien d’autres encore, réveille une nouvelle fois le spectre latent des luttes raciales aux États-Unis. En solidarité au mouvement de colère qui gronde aux États-unis depuis le 25 mai dernier, de nombreuses initiatives appellent à s’engager pour rendre justice à ces Noirs américains victimes des violences racistes.
Vendredi 29 mai, deux cadres afro-américaines de l’industrie musicale, Jamila Thomas, employée d’Atlantic Records, filiale de Warner Music Group, et Brianna Agyemang, ancienne employée du label, ont créé le hashtag #TheShowMustBePaused (« le spectacle doit faire une pause » en référence à l’expression « The Show Must Go On »). Ce mardi 2 juin, c’est l’ensemble de l’industrie de la musique qui a mis en pause ses activités de la journée en soutien à la lutte contre les violences policières envers la communauté noire.
« Le mardi 2 juin est destiné à perturber intentionnellement la semaine de travail, expliquent Jamila Thomas et Brianna Agyemang dans leur communiqué. L’industrie de la musique est une industrie de plusieurs milliards de dollars. Une industrie qui a surtout profité de l’art noir. Notre mission est de responsabiliser l’ensemble de l’industrie, y compris les grandes entreprises + leurs partenaires qui bénéficient des efforts, des luttes et des succès des Noirs. […] Ce n’est pas seulement une initiative de 24 heures. Nous sommes et serons dans ce combat pour le long terme. Un plan d’action sera annoncé. »

Les plus grandes maisons de disques américaines, leurs filiales et d’autres labels indépendants rejoignent le mouvement : Interscope, Universal Music, Warner Music Group, Atlantic Records, Capitol Music Group, Columbia Records et Kobalt Music Group suspendent ainsi leur activité aujourd’hui en signe de soutien, ils ne sortiront aucun morceau de musique cette semaine. Selon un message publié lundi par Universal Music, le mardi 2 juin est « une journée pour observer, prendre contact et s’organiser. » Pour Sony Music, c’est « une journée d’action consacrée à des changements significatifs dans notre société, dès maintenant et dans l’avenir ».
Les plateformes musicales marquent elles aussi leur soutien. Bandcamp fera don de 100% de ses bénéfices aux fonds de défense juridique de la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP) chaque 19 juin, jour de commémoration de l’abolition de l’esclavage aux États-Unis. « Nous allouons également 30 000 dollars supplémentaires par an à des partenariats avec des organisations qui luttent pour la justice raciale et créent des opportunités pour les personnes de couleur » déclare la plateforme de musique. De la même manière, Beatport fera don des recettes de ses ventes d’aujourd’hui, mardi 2 juin, à la NAACP.
SoundCloud s’est également joint au mouvement en affichant une page d’accueil couverte de ratures noires à laquelle elle accompagne un message : « Depuis son lancement en 2007, SoundCloud est une plateforme où la voix de chacun peut atteindre le monde entier. Mais lorsque vous ne pouvez pas respirer, votre voix ne peut pas être entendue … »
Par un communiqué, Spotify annonce de son côté des changements à partir de 12h01 sur la plateforme. « Le 2 juin est le Black Out Tuesday, une journée de déconnexion collective du travail destinée à aider les gens à réfléchir et à se rassembler pour soutenir la communauté noire. En ce jour – et tous les jours – Spotify soutiendra nos employés, amis, partenaires, artistes et créateurs dans la lutte contre le racisme, l’injustice et l’iniquité ». Le géant de la musique affichera des logos noirs sur plusieurs playlists (notamment des playlists urbaines et R&B) et sur la couverture de podcasts. Une pause est prise dans la publication des médias sociaux. La plateforme annonce sur son blog officiel que « certaines listes de lecture et podcasts participants incluront un morceau de silence de 8 minutes et 46 secondes en guise de reconnaissance solennelle pour la durée de la suffocation de George Floyd ». La plateforme souhaite également soutenir des créateurs noirs en mettant davantage en avant les artistes et podcasteurs noirs.
De nombreux médias et journaux web se joignent eux aussi au mouvement. En soutien à la communauté noire du monde entier, le magazine britannique Crack annonce que la rédaction ne publiera pas de contenu aujourd’hui, et mettra à disposition des ressources informatives et éducatives ainsi que des liens pour signer des pétitions ou pour effectuer des dons à des fonds ou à des organisations de lutte contre le racisme aux États-Unis ou au Royaume-Uni. La webradio Rinse France arrête elle de diffuser pendant 24h pour le Black Out Tuesday. La radio appelle à l’« action urgente pour provoquer la responsabilisation et le changement ». De nombreux autres médias comme DJ Mag, The Vinyl Factory, Resident Advisor ou Digital Music News souhaitent faire du Black Out Tuesday « une journée pour se déconnecter du travail et se reconnecter à notre communauté ».
Ces initiatives sont aussi soutenues par plusieurs artistes dont Laurent Garnier, Rone, Arnaud Rebotini, ou encore Partiboi69 qui publient une photo noire sur leurs réseaux sociaux. Enrico Sanguliano à quant à lui déclaré : « la techno a toujours représenté une résistance musicale libre et antiraciste. […] Demain, je me retirerai des médias sociaux par solidarité avec la communauté noire ».
Par solidarité, la rédaction de Trax a choisi de seulement publier, ce mardi 2 juin, certains articles d’information en lien avec les événements actuels.