Le Liban traverse une période de tensions politiques. Avec 35 % de la population vivant sous le seuil de pauvreté (en l’occurrence, 728 $/mois), des pénuries d’eau et d’électricité à répétition et des infrastructures en ruine, le gouvernement est accusé de corruption et d’incurie. Suite à l’annonce d’une taxe sur l’application d’appels gratuits WhatsApp, les manifestations se succèdent pour la démission de celui-ci dans une ambiance festive depuis deux semaines. Le pays n’avait jamais connu de tels soulèvements depuis la guerre civile en 1990. Plus de 2 millions de personnes, soit plus d’un tiers du pays, sont descendues dans les rues de Beyrouth, Tripoli, Saïda et Tyr. « Notre colère nous rapproche, on se retrouve à discuter avec des gens à qui l’on n’aurait jamais adressé la parole en temps normal, on a fait tomber le mur des peurs confessionnelles », s’est exclamée une lycéenne sur le magazine Le Monde.

Effectivement, ces manifestations permettent aux Libanais de se rassembler entre individus de toutes classes sociales et toutes religions. Ce fut encore le cas vendredi dernier quand L’Œuf de Beyrouth, ce bâtiment promis à la grandeur en 1965, mais dont la construction fut interrompue en 1975 par la guerre civile, est devenu le théâtre d’une free party. Cette soirée improvisée a permis aux participants de se rassembler encore contre le gouvernement autour de la musique électronique. « Il faudrait être sacrément pisse-froid et méconnaître l’histoire pour vouloir exclure la fête des pratiques révolutionnaires », affirme le magazine L’Orient-le jour dans un reportage.

En effet, en plus de rassembler près d’un millier de fêtards d’horizons variés, cette “rave-olution” a permis aux Libanais de créer un événement rarissime alliant fête et rébellion, et partant, de renouer avec l’histoire de ce bâtiment qui, éternelle ruine adoptée par les Beyrouthins, accueillait déjà des free parties dans le Beyrouth post guerre civile.