D’où sort cette mystérieuse partition synthétique d’une heure dont Coppola n’a pas voulu ? Ou plutôt : pourquoi n’a-t-elle pas été utilisée ? Dans le livre David Shire’s The Conversation: A Film Score Guide, écrit par un certain Juan Chattah, l’histoire se clarifie. Il s’agirait, en réalité, d’un conflit entre Coppola et l’auteur de cette même BO, David Shire. Ce dernier aurait accepté un contrat pour un autre film, Norma Rae, sorti la même année qu’Apocalypse Now et réalisé aux Philippines. Coppola l’aurait découvert et, fou de rage, aurait congédié Shire sur-le-champ – alors qu’il composait la partition synthétique depuis 1976. Selon les dires du compositeur, il aurait retrouvé la cassette il y a quatre ans, au fond d’un tiroir ! Il explique que Coppola désirait une bande originale unique, composée seulement à l’aide de synthétiseurs analogiques. A deux, les artistes auraient pu conférer une « froideur » intéressante au film, notamment lors de la scène du raid des hélicoptères instrumentalisée par la Chevauchée des Walkyries de Wagner. La bande originale sera finalement composée par le père de Coppola, Carmine.
À noter que la musique électronique tient une place de choix dans la composition des bandes originales de films. On pense d’abord à Giorgio Moroder, pionnier du disco italien et de la musique électronique dans les années 70. Ce magnat du synthé composera la musique du film Scarface, réalisé par Brian de Palma en 1983. Il sera aussi à l’origine de la BO de Midnight Express, chef d’oeuvre d’Alan Parker, pour lequel il recevra notamment l’Oscar de la Meilleure musique de film en 1978 – et le premier attribué à une bande originale électronique. Bande qui aurait dû, à l’origine, être confiée à Vangelis, autre pionnier de la musique électronique des années 70 et compositeur de la BO de Blade Runner en 1982. Dernier exemple : le maître de l’horreur John Carpenter, à qui l’on doit Halloween ou encore The Thing, compose lui-même ses bandes originales de nature électronique – une oeuvre qui a d’ailleurs très clairement inspiré la musique de la série phénomène de Netflix Stranger Things.