En studio comme sur scène, Anchorsong privilégie “la puissance de la simplicité“, sa MPC 2500 et un unique clavier comme instruments fétiches. Après un premier album Chalpters sorti en 2011, il démontre ses prouesses en live lors d’une Boiler Room en 2013 ainsi que cette année à l’occasion des Red Bull Studio Sessions de Tokyo. Adepte de live sampling et de finger-drumming, il apparaît sans surprise à l’affiche aux côtés de DJ Krush, Bonobo ou Daedalus.
Son deuxième album Ceremonial, déjà disponible en CD et digital, fait actuellement l’objet d’une campagne de financement sur le site de crowdfunding Diggers Factory, pour un pressage vinyle en double LP. Masaaki Yoshida a parlé à Trax de son parcours, de ses influences et de son amour pour le live.
Parle-nous d’Anchorsong, qu’est-ce qui caractérise ce projet?
L’idée centrale est de jouer de la musique électronique “physiquement”, sans utiliser d’ordinateur. Lorsque je suis sur scène, je me sers uniquement de hardware, d’une MPC et d’un clavier. J’ai été guitariste dans un groupe de rock pendant 4 ou 5 ans avant de faire de la musique électronique, et c’est cette énergie que j’essaie de reproduire en live. Lorsque le groupe s’est dissous aux alentours de 2004, j’ai commencé à me produire en tant qu’Anchorsong à Tokyo, avant de m’installer à Londres en 2007.
Pourquoi avoir choisi cette ville ?
J’ai toujours été attiré par l’Angleterre, un grand nombre des musiciens que j’admire y ont fait carrière, comme les Beatles ou Black Sabbath. C’est là que se situent mes racines musicales et j’ai profité d’une date en Grèce pour prendre un aller-simple pour Londres au lieu de rentrer au Japon.
En termes de musique électronique, quelles sont tes influences ?
Je citerais DJ Shadow et Björk bien entendu, vu que mon pseudonyme est emprunté au titre de l’une de ses chansons. Je pense que ma musique n’a rien à voir avec la sienne au niveau des sonorités, mais j’admire sa capacité à intégrer toutes sortes d’influences dans un style qui lui est propre. C’est aussi ce que j’essaie de faire.
Avec Ceremonial, tu t’éloignes des rythmiques house de ton premier album Chapters. Pourquoi ce changement de cap ?
Ce second album est très influencé par la musique d’Afrique de l’Ouest des années 70, et c’est quelque chose de très nouveau pour moi. Sur Chapters, je faisais de la musique électronique plus “classique” et j’ai fini par trouver cela ennuyeux, il fallait que je passe à autre chose.
Anchorsong – Expo
Ennuyeux en quoi ?
Le processus de production, l’usage de samples en one-shot que tu places les uns après les autres : d’abord les kicks, puis les snares, les hats… C’était de la programmation pure, et je me suis mis à chercher quelque chose de plus dynamique. J’ai continué à utiliser la MPC, qui permet de faire le lien entre la musique électronique et le côté organique des samples. Lorsque je l’utilise en live, je m’en sers comme un percussionniste, c’est ça qui me plaît.
Où trouves-tu tes samples ?
Un peu de partout, je me sers autant de packs de production que je télécharge que de vieux disques, comme les enregistrements de l’Orchestre Poly-Rythmo de Cotonou pour le nouvel album par exemple. Mais mon label ne veut pas trop que je parle des artistes que je sample, pour ne pas avoir de problèmes (rires). Une des difficultés pour Ceremonial a justement été de faire cohabiter les samples lo-fi des 70’s et les sons très propres que l’on trouve maintenant. J’ai utilisé beaucoup de saturation et de compresseurs pour arriver à un résultat cohérent.
On voit actuellement de plus en plus de producteurs qui s’inspirent de cette période de la musique africaine (Romare en Angleterre ou Mawimbi en France, notamment), à quoi penses-tu que cela soit lié ?
Il doit y avoir plusieurs raisons à cela, la première étant que la dance music doit énormément au funk et au disco, et que ces influences sont aussi très présentes en Afrique dans les années 70. Par ailleurs, il me semble aujourd’hui que la musique électronique ne suit pas un courant global mais que tout le monde cherche à innover de son côté, ce qui peut expliquer cette remise au goût du jour de styles plus anciens. Il suffit d’écouter les disques de l’époque pour se rendre compte que les arrangements sont toujours efficaces aujourd’hui, notamment la manière sourde et puissante dont sont souvent masterisées les percussions. Pour ma part, j’essaie de combiner les éléments traditionnels et contemporains sans verser dans la nostalgie.
Anchorsong – Ceremony
Tu crains parfois de dénaturer la musique que tu samples ?
Les phrases de musique africaine que je réutilise se prolongent souvent sur une ou deux mesures et comportent beaucoup de variations de tempo, ce qui m’oblige à construire mes morceaux autour des samples au lieu de simplement les placer sur une grille. Je fais très attention au caractère de chaque instrument ; par exemple, je joue régulièrement avec un quatuor à cordes mais je sais que cela ne se marie pas bien avec les percussions africaines, donc je me limite avec eux à certains morceaux que je réarrange pour l’occasion.
As-tu prévu de jouer avec d’autres musiciens en live ?
Je l’espère, que ce soit sur scène ou en studio. Je suis actuellement en discussion avec Camilo Tirado, un joueur de tablas [les fameuses percussions indiennes couplées à la sitar, ndlr] qui a déjà collaboré avec James Holden pour Outdoor Museum of Fractals. Mais à ce stade, il ne s’agit encore que d’une idée car les tablas ont un caractère vraiment unique, et si je les intègre de la mauvaise manière dans mes compositions, je sais que le résultat sonnera kitsch et artificiel. J’essaie donc d’être prudent, mais ces percussions assez exotiques me fascinent vraiment.
Une date prévue en France prochainement ?
Il se pourrait que je joue à quelques festivals, mais rien n’a été confirmé pour l’instant.
Pour participer à la campagne de financement du 2XLP de Ceremonial sur le site de Diggers Factory, c’est ici
Anchorsong Boiler Room LIVE Show