À voir : Un documentaire explore la fulgurante explosion des soirées techno au Kosovo

Écrit par Amaury Lelu
Photo de couverture : ©D.R
Le 20.06.2019, à 16h08
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Écrit par Amaury Lelu
Photo de couverture : ©D.R
Niché aux coeur des Balkans, le Kosovo voit depuis peu émerger l’organisation de soirées techno dans sa capitale, Pristina. Le petit pays peut compter sur la jeunesse pour devenir un acteur majeur de la scène électronique européenne. Rencontre avec Sara Kheladi, qui a filmé les DJ’s à l’origine du mouvement dans un documentaire au nom évocateur : Technosovo.

Au cours d’un échange universitaire en Palestine, Sara Kheladi se découvre une passion pour le journalisme et la vidéographie. En mars dernier, lors d’un voyage de deux semaines au Kosovo, la franco-algérienne réalise un documentaire sur une scène techno locale en plein essor : Technosovo.

Pourquoi avoir voulu traiter de ce sujet ?

Au départ, ce n’était pas du tout une envie de ma part et je pensais plutôt faire un sujet lambda sur l’économie ou l’histoire du pays. J’ai ensuite rencontré Dren Maliqi, propriétaire du M Club, grâce à une pote kosovare qui le connaissait un peu. On a fait un interview dans laquelle on a beaucoup parlé de la scène électronique et j’ai su que je voulais réaliser mon documentaire là dessus. J’ai alors cherché à montrer le Kosovo comme on ne l’a jamais vu.

Comment s’est développé la techno au Kosovo ?

Après la guerre en Yougoslavie, entre 1998 et 1999, un groupe commence à faire des petites soirées en voyant ce qui se passe à Berlin ou à Londres. Très vite, l’effervescence retombe car très peu de lieux peuvent accueillir les événements. Aujourd’hui, il y a un vrai retour de la musique électronique avec des DJ’s étrangers qui viennent à Pristina. C’est aussi grâce au collectif Hapësira, qui est présent au Kosovo depuis 4 ans. Leur objectif est de conserver l’ancienne imprimerie Rilindja pour y développer l’art et la culture. Le nom de ce bâtiment signifie “renaissance” en français. Cet endroit appartient à l’Etat, qui le loue à différentes structures. Un immense complexe s’étalant sur une centaine d’hectares avec des salles de boxes et de fitness.

Dans le documentaire, vous évoquez le collectif Hapësira, comment s’organisent-ils ?

Leur organisation ressemble à la nôtre car ils font appel à des sponsors ou des promoteurs. La différence est qu’un ambassadeur allemand soutient les actions mises en place à Rilindja, ce qui leur permet de continuer à utiliser le lieu. Il y a aussi le fait que c’est vraiment de l’entraide parce que tout le monde galère et le milieu est petit. Ils partent du principe qu’ils n’ont rien à perdre et que la vie est trop courte. Certains événements fonctionnent vraiment bien, comme leur Boiler Room du 8 mai dernier. L’été, le collectif arrête les soirées pour organiser le festival Visions of Beyond, qui commence le 18 août dans une petite ville à la campagne .

Quelle est la réaction du gouvernement face à la démocratisation de ce type de soirée ? 

Les autorités ne prennent pas la mesure du phénomène. Il y a un détachement, une espèce de lâcheté et de fuite. Leurs dirigeants laissent tomber la jeunesse et ne cherchent pas à créer des alternatives. Des événements sont annulés et les amendes pleuvent. Dans les locaux de Rilindja, une chaine de télévision se trouve à côté du collectif. Elle tente de les chasser pour y agrandir son espace. Alors que les médias pourraient soutenir le développement de la culture, ils sont dans une logique inverse. Le Kosovo est aussi un pays musulman. Il est influencé par la culture occidentale et reste plus tolérant que les pays arabes, mais cela peut être un frein.

La jeunesse kosovare semble très impliquée dans la pérennisation du mouvement. Pourquoi ?

C’est un pays très paradoxal avec peu de travail mais beaucoup de jeunes. Ceux-ci parlent tous anglais et son parfaitement bilingues. Ils consomment la culture occidentale, mais restent bloqués au Kosovo car l’Union Européenne leur refuse des visas. Le collectif Hapësira est motivé pour inspirer les jeunes car c’est eux qui seront à l’origine du futur culturel du Kosovo. Il veut préparer une société dans laquelle les jeunes adultes auront une place.

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