À voir : les raves et bunkers de Bretagne dans le livre de la photographe Julie Hascoët

Écrit par Trax Magazine
Photo de couverture : ©Julie Hascoët
Le 27.07.2022, à 17h40
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©Julie Hascoët
Écrit par Trax Magazine
Photo de couverture : ©Julie Hascoët
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En mettant en parallèle les murs de béton et les murs du son, la photographe Julie Hascoët signe un livre qui magnifie la culture des raves et les paysages humides de la Bretagne.

Entre un paysage et ceux qui l’occupent, il existe toujours des correspondances aussi fascinantes que mystérieuses. Ce sont ces liens que la photographe bretonne Julie Hascoët a voulu raconter en commençant à documenter conjointement les rave party bretonnes et les bunkers qui jonchent la côte atlantique. Lors de ses explorations, cette dernière s’est rapidement rendu compte que ces deux sujets à priori distincts communiquaient dans ses photographies, comme des échos visuels : un motif camouflage, une bâche, un ciel chargé, une façade d’enceintes ou un bloc de béton dans la rosée du matin. « Il y a eu plusieurs liens que j’ai trouvés à mesure que je faisais ce projet. Déjà, il y avait cette idée du mur de l’Atlantique, en clin d’œil avec le mur du son des sound systems, » explique Julie Hascoët. « Le thématique du mur a été beaucoup étudiée en histoire de l’Art pour ce qu’elle raconte de construction et de déconstruction, pour ce qu’elle dit sur la création d’une identité, d’un sentiment de communauté. Contre qui on se place quand on construit un mur ? Dans le cas des murs du son, c’est assez clairement en opposition à l’État. »

©Julie Hascoët

Évidemment, c’est sur le territoire breton que ce projet pouvait trouver sa résonance la plus juste tant cette région regorge de fêtes sauvages et de blockhaus abandonnés. « Il y a cette idée que la Bretagne est une terre de fête. C’est une région qui compte énormément de free parties et de collectif de sound systems très actif. On peut faire un lien avec la tradition des festnoz ou celle des tasseurs de sols, une pratique rurale de danses rituelles pendant laquelle, sur fond de musique de transe, on bat du pied toute la nuit pour tasser le sol. J’y vois une sorte de lien immémoriel, » explique la photographe.

D’un point de vue architectural, c’est un patrimoine de guerre très lourd que met en image Julie Hascoët, qui renvoie par effet de miroir au concept quasi opposé de la Zone Autonome Temporaire. Développé par le penseur anarchiste Hakim Bey, cette idée souvent reprise dans le monde de la free party évoque un espace éphémère, autonome et démontable qui se rapprocherait presque d’une sorte d’opération de guérilla et dans lequel les règles habituelles n’auraient plus lieu d’être. Construire, déconstruire, investir une zone puis la déserter, par sa manière de mettre en correspondance les images, Murs de l’Atlantique explore tout en même temps : les forces nomades des raves et l’ancrage brutal des édifices de guerre.

©Julie Hascoët
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En filigrane, c’est une géographie cryptée que dessine le travail de la photographe : « Les bunkers ne sont pas spécialement inventoriés. Et lorsqu’ils le sont, il suffit de se rendre sur place pour voir que le bâtiment est souvent recouvert de sable ou enfoncé dans la végétation. Le relief a changé, on ne voit plus la forme du bunker. Tout ça génère une sorte de géographie secrète. C’est un peu pareil pour la teuf. À un moment donné, tu vas avoir une info mais comme la Police est déjà là, la fête va avoir lieu ailleurs. »

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Paru aux éditions Autonomes, une très belle maison indépendante basée à Brest, ce projet ne pouvait trouver meilleur point de chute tant les livres, fanzines et essais qui y sont publiés font preuve d’une liberté qui résonne avec les images de Julie Hascoët.

Murs de l’Atlantique, de Julie Hascoët, aux éditions Autonomes©Julie Hascoët
Murs de l’Atlantique, de Julie Hascoët, aux éditions Autonomes©Julie Hascoët
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