La semaine dernière, Trax vous présentait le projet de Jeff Mills et du saxophonistes de jazz Émile Parisien en hommage à John Coltrane créé pour Variations, un projet co-produit par Sourdoreille et La Compagnie des Indes qui invite des producteurs de musique électronique à jouer en duo avec des instrumentistes.
Vous pouvez désormais visionner la seconde des cinq performances jouées en septembre dernier au Cabaret Sauvage : Chloé, ex-résidente du Pulp et cofondatrice du label Kill The DJ, s’associe à la joueuse de marimba Vassilena Serafimova et puise dans le répertoire du compositeur minimaliste Steve Reich pour une réinterprétation où les harmonies répétitives se mêlent au bourdonnement des synthétiseurs, dans un bercement pulsatile qui se déphase et se réécrit sans cesse.
Ce projet expérimental n’est pas une première pour Chloé : en 2015, elle était invitée par l’Ircam (L’institut de recherche et coordination acoustique/musique, fondé par Pierre Boulez) à l’occasion de la Nuit Blanche pour une performance connectée, où les smartphones de l’audience devenaient des instruments à part entière.
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L’occasion également de relire notre interview où l’artiste militante aborde extensivement la question de la place des femmes dans le milieu des musiques électroniques.
Est-ce si différent d’être aujourd’hui Chloé, une femme DJ, par rapport à tes débuts, il y a 20 ans, quand tu as commencé à mixer au Pulp ?
(Elle sourit) J’ai même commencé à mixer avant le Pulp ! Aujourd’hui, je dirais que c’est plus facile parce que la musique électronique est plus acceptée, voire plus démocratisée. A la différence, quand j’ai commencé, la musique électronique n’était qu’une niche plutôt mal vue par les institutions et par la police. Elle n’était jouée que dans les raves ou dans deux ou trois clubs gays à Paris et d’autres villes. Ça n’avait donc pas tout à fait le même impact.
Sans Internet, dans ce climat, qu’est-ce qui t’as donc poussé à devenir DJ ?
Quelque part, dans les années 1990, faire de la musique électronique, c’était un peu un acte politique et militant. Ces clubs comme le Queen, le Palace, etc. étaient les seuls endroits où je retrouvais toutes les catégories socio-professionnelles. Tous se mélangeaient, tous les genres aussi, c’était hyper éclectique. Les seuls endroits où tout le monde était au même niveau. C’est ce qui m’a attiré : je recherchais une forme d’apaisement dans ma vie, et donc, me retrouver dans ces espaces. Ça allait de pair avec la musique électronique. Ce qui est étrange, c’est que je ne me suis jamais dit que j’allais ensuite devenir DJ ou même productrice. C’était mal vu, et n’était pas considéré comme un métier. Je composais un peu de musique à la guitare sur des quatre pistes, je faisais du théâtre tout en étudiant le droit, et j’ai commencé à mixer comme quand tu apprends à jouer d’un instrument de musique. Tout s’est fait naturellement. Aussi parce que je sortais tout le temps, tous les week-ends. Ma deuxième maison, c’était les clubs et les sorties.
Est-ce que tu avais des modèles d’autres femmes artistes quand tu as débuté ?
Je n’avais aucun modèle précis dans la musique électronique. Ce n’est pas une femme précise qui m’a fait dire « tiens, je vais devenir DJ ». Tout ce que j’ai fait dans ma vie, même étant plus jeune, ce n’était pas ce que faisait forcément les filles. Les filles n’apprenaient pas spécialement à jouer de la guitare à l’époque. Or, je traînais beaucoup avec des garçons, je collectionnais des disques et j’étais surtout attiré par des groupes de musique pop rock, les Pink Floyd, les Beatles. Mais je ne me disais pas non plus que je voulais être chanteuse.
Mais cette absence de modèle ne t’a pas manqué ?
Pas du tout.
Est-ce qu’à l’ouverture du Pulp, en 1997, quelque chose a changé pour les musiques électroniques, la production, le clubbing et l’underground ?
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Prochains épisodes de VARIATIONS
– Electric Rescue x Gaspar Claus sur JS Bach (29 novembre)
– Dubfire x Mari Samuelsen sur Arvo Pärt (6 décembre)
– Zadig x Thomas Enhco sur Bernard Hermann (13 décembre)
Steve Reich – Six Marimbas