Photographe habitué des scènes psytrance du monde entier, Jesse Thompson fait partie de ceux qui savent le mieux rendre compte de la magie de ces festivals. Transahara, Ozora et même le Tribal Gathering du Panama, son objectif n’a manqué aucun de ces événements colorés et fantasques.
En 2015, le jeune Australien s’est rendu au Teknival, avec Leonard Carolyne – son colocataire, qui est aussi sociologue –, pour y réaliser un reportage. Long d’une vingtaine de minutes, il s’attache à raconter avec force et réalisme l’histoire d’un mouvement réprimé sans relâche, jusqu’à y perdre parfois ce qui fait sa force. Le titre du documentaire pose d’ailleurs le problème dès le début : Teknival : La Fête Libre ?
On rencontre dans ce film différents personnages dont des organisateurs de free party, le soundsystem Happy Tek Family, et toutes sortes de ravers qui rendent comptent de la diversité qui existe au sein de la communauté free.
En 2015, le Teknival s’était organisé en partenariat avec les autorités – comme depuis plusieurs années – donnant lieu à toutes sortes de problèmes liés à l’idéologie free party. Il faut dire que depuis sa création, il y a plus de vingt ans, l’esprit Spiral Tribe a perdu de sa superbe. À l’époque, le mouvement prônait une liberté sans concessions et refusait consommation de masse. Aujourd’hui, dealers et vendeurs de sandwichs envahissent les terrains de teuf. “Il n’y a plus d’identité”, déclare un raveur en pensant à cette manie qu’a la société de consommation de s’infiltrer partout.
Mais bien que le mouvement ait perdu de ses belles idées, le public y revient. “C’est le seul endroit où je peux m’exprimer”, explique un organisateur de freeparty. On y revient pour danser, communier, rencontrer et partager. Chaque fois, une free party ou un Teknival est une longue aventure dont on garde des souvenirs chaleureux, ou plus amères lorsqu’il s’agit d’un retrait de permis.
Et si l’analyse du documentaire est au plus près de la réalité, elle peut toutefois être nuancée. Un an plus tard, les choses ont changé. Bien entendu, le mouvement est toujours discriminé et réprimé mais bonne nouvelle : le Teknival est à nouveau illégal. Plus question pour les organisateurs d’accepter l’ingérence de l’État dans leurs affaires, il était temps de montrer de quoi le mouvement est vraiment capable.
Cette année, le Teknival a encore réunit plusieurs milliers de personnes à quelques kilomètres d’Étampes. Le bilan : peu d’accidents, aucun déchet et un Teknival réussi. Revendicatif et autogéré, l’événement a prouvé à tous que le mouvement rave ne ressemble en rien à l’image qu’on lui donne.
Léonard Carolyne, qui a co-réalisé le documentaire Teknival : La Fête Libre ? a également rédigé un article de plusieurs pages qui détaille plus longuement son analyse sociologique du phénomène Teknival et de son évolution. Retrouvez le ici.